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Geneworld.net>Ficciones>Dark fullmetal>Akai Hana

03 - LA LUNE ET LE DRAGON ROUGE POR DARK FULLMETAL

-Hime-sama, il est temps pour vous de rejoindre le Roi sur le balcon royale.
-La cérémonie du mariage va bientôt commencer, Hime-sama.
-… Oui. Je comprends.
La jeune femme, vêtue d’une longue tunique rouge ornée de chrysanthèmes blancs recouverte d’une robe de soie blanche serrée à la taille par un ruban rouge, les cheveux noirs tombant jusqu’au bas du dos, coiffée d’une sorte de couronne fine et dorée, les lèvres rougies et le visage blanchi par le maquillage, se retourna vers les deux servantes du roi venues l’accompagner jusqu’au lieu de la cérémonie. Une larme coulait discrètement sous son œil gauche.


Chapitre 3
La lune et le dragon rouge




La princesse Yumi, qui allait devenir reine de Nuki Okushi Nai, marchait à travers un long corridor dans l’immense palais, accompagnée et suivie d’une dizaine de servantes qui lui étaient dévouées. Après avoir traversé ce long chemin éclairé par d’innombrables lumières de la couleur du crépuscule, elle se retrouva dans une grande cours, large, dont le sentier marqué par des dalles de pierres blanches était entouré de cerisiers et de coins d’eau embellis d’une flore remarquable ; le reste du sol de la cours était recouvert de graviers d’un blanc semblable à celui de la neige.
La future reine continuait d’avancer mais, préoccupée par maintes pensées, elle ne regardait que le sol qu’elle foulait. Quand elle releva les yeux, elle vit que les dix Aspirants l’attendaient devant les deux grandes portes qui menaient au balcon royal. Lorsqu’elle passa devant eux, elle leur adressa un sourire et inclina légèrement la tête afin de les saluer, ils lui renvoyèrent le geste en s’inclinant et prenant une position de révérence. Le regard de la jeune princesse s’attarda sur le dernier de ces samouraïs aux cheveux noirs épars aux mèches rouges. L’expression de joie qui avait prit son visage lorsqu’elle vit ces soldats disparut, laissant de nouveau place à une mine triste et tourmentée.

Le grand portail s’ouvrit et Yumi put se rendre compte de l’importance de la cérémonie. A quelques pas d’elle se trouvait le balcon royal où le roi Cia Honji et un prêtre l’attendaient déjà. Sur les côtés de ce balcon, deux grands escaliers descendaient jusqu’à la cours principale de l’entrée du palais. Cette vaste cours était noire de monde. Une poignée de gardes seulement surveillait l’entrée du palais et l’accès aux escaliers, les sentinelles tournaient le dos à l’événement et regardaient en dehors de l’enceinte. Même derrière les portes principales du palais, une foule en masse attendait l’instant où le roi et la princesse serraient enfin unis. Yumi s’avança à pas hésitant près du roi et la cérémonie pouvait enfin débuter. Les dix Aspirants se tenaient droits derrière elle, derrière ces portes ouvertes qui séparaient les deux cours. L’un d’eux s’en alla par l’arrière du palais avant même la déclaration solennelle du mariage, ne pouvant supporter de voir celle qu’il aimait lui être arrachée, une sombre expression dans le regard.

La nuit était tombée. Les dix soldats avaient trouvé une auberge proche du palais afin d’y passer la nuit, ils repartiraient le lendemain. La lune éclairait le ciel de son blanc pur, et comme à son habitude, Kaito s’était isolé en hauteur pour l'admirer et aussi les feux d’artifice qui décoraient la voûte céleste de centaines de couleurs. La fête battait encore son plein au palais, on pouvait entendre la musique et les cris de joie depuis leur auberge. Les neufs autres soldats parlaient et, pour certains, mangeaient au premier étage au milieu de la clientèle toute excitée par l’événement du jour. Ren, qui revenait du second étage après s’être changée, remarqua l’absence de Kaito.
-Tiens ! Il n’y a pas Kaito ?
-Non, qu’est ce que tu crois ? Ce chat stupide est encore monté sur le toit. Il le fait presque tous les jours.
-Ah oui, c’est vrai.
Akira bailla bruyamment et s’étira.
-Quelle semaine épuisante! Rester dans cette auberge à ne rien faire pendant que la princesse se faisait chouchouter par ces magnifiques servantes…
-Tu n’avais qu’à nous suivre, reprit Yuri, on est pas mal sortis se promener dans la ville et aux alentours.
-Non ! Pas envie de me fatiguer encore plus.
-T’as largement eu le temps de te reposer avec Kaito, vous dormez tout le temps lorsque vous le pouvez.
-La note revenait chère à cause de tout le lait que vous avez englouti… rajouta Shinobu.
-Il faut se plaindre à Kaito, c’est lui le buveur de lait dans l’équipe !
Ils continuèrent de débattre sur la quantité de lait que pouvait boire Kaito par jour. Seul Shiito restait silencieux. Hiro se tourna vers lui et lui mit un léger coup sur l’épaule.
-Hé ! Shiito, ça ne va pas ?
-…
-Ca veut dire non à mon avis, dis Yuki.
-Dans ce cas…
Shin se tourna vers le bar, leva son verre et cria : « SAKEEEEEEEEE !! » Là, une serveuse arriva avec un plateau sur lequel était tout un service pour le saké. Elle servit chacun d’eux, même les trois filles qui supportaient très bien l’alcool, puis repartit servir d’autres clients. Hiro posa une coupe de saké juste devant Shiito et l’incita à boire.
-Allez ! Ne fais pas cette tête d’enterrement et bois un coup ! C’est la fête en plus !

Shiito se tourna vers lui en affichant une tête effrayante de déprimé. Hiro en eu des frissons dans le dos.
-Arrête de faire cette tête tu me fais peur ! On dirait un revenant, ajouta-t-il doucement.
-Je suis pas d’humeur.
-HA ! Tu parles enfin ! s’écria Mitsuko. C’est la première fois que tu parle depuis trois jours, et encore ! C’était limite si tu ne disais seulement : « Non. Allez-y sans moi. » ou bien « Je vous rejoindrais. » En plus, au final, tu ne venais même pas, ajouta-t-elle tristement.
-Bon allez, reprit soudain Ren d’un ton déterminé, si tu bois cette nuit, je te promets de te laisser tranquille toute la semaine prochaine.
-D’accord.
-Héé ?
-Apparemment tu l’embêtes pas mal pour qu’il accepte comme ça, déclara Akira.
-Mais non ! Pas du tout !
-Tu veux peux être que je te fasse la liste ? Alors, pour commencer : tous les matins tu me réveillais en me frappant avec un oreiller de l’auberge (en plus des fois ils piquent) ; ensuite au déjeuner, tu parles, tu parles et tu parles sans arrêt de tes conquêtes masculines et de tous les beaux hommes que tu croises dans les rues ; après ça tu continues de parler sans arrêt à chacune de nos sorties ; et puis, blabla, blablabla et blablabla...
-Et bien, ça fait beaucoup. Il faudrait presque un parchemin pour tout écrire, pouffa Yuri.
-Dis-donc toi!!

-Bon, cela dit, tu devrais tout de même boire un coup ! reprit Yuri, la joue gauche rougie par une certaine gifle.
-Tss… vous êtes lourds. Va pour une coupe. »

« Alleeeeeeeeeeeeeez !! Encoooreuuuuuuh !
-Mais c’est déjà la 11ème !
-Urusei ! C’est même pas vrai ! Et puis, de toute façon, j’vous aime plus ! et je m’en vais boire… euh… voir ! mon Neko adoré… sur le toit !
-Il a trop bu! s’écria Hiro mort de rire.
Shiito se leva difficilement de sa chaise, et, par inadvertance, bouscula une serveuse qui renversa tout un service sur un homme large et épais dont les muscles ressortaient sous son habit marron. Cet homme poussa un juron, injuria la pauvre femme et la saisit par le col.
-C’est quoi ce bordel ? T’es pas foutue de tenir ton plateau en équilibre !?
-Je... désolée!
Shiito, qui venait tout juste de comprendre ce qu’il se passait, vint derrière l’imposant personnage et lui tapota l’épaule afin de l’interpeller.
-C’est toi l’abruti qui a fait renverser cette merde sur moi ?
-Euh ! S'il vous plait! Je vous serais gré de rester poli, surtout envers cette charmante demoiselle que j’ai acci… dentelle... ment bousculé ! Et puis, cette « merde », est très buvable ! Ce doit être vous qui… oulà ! dit-il en vacillant, qui avez des goûts inqualifiablement… pas tellement trop terrible !
-Il se moque de moi ? demanda le géant en prenant un ton plus grave.
-Qui ? Vous ! Naaaan, j’oserais jamais me moquer d’un crétin tel que la personne idiote que vous êtes… surtout ! Vous n’êtes pas si beau ! J’me demande comment font ces jeunes femmes qui vous accompagnent pour vous… accompagner !
-Fais gaffe à ce que tu dis le mioche !
-Monsieur, veuillez l’excuser, il a un peu trop bu ! déclara Shinobu en se positionnant entre les deux personnages.
-Je ne le pardonnerais que lorsqu’il sera face contre terre à prier pour que je le laisse en vie !
Sur ces dernières paroles, les autres clients se levèrent et s’écartèrent pour regarder la scène, et le personnel de l’auberge se rangea derrière le bar. Les huit autres Aspirants se levèrent à leur tour pour rester près, au cas où la situation partirait mal. La tension commençait à peser sur toutes les personnes en présence. L’homme imposant par son gabarit fit craquer ses phalanges et baissa la tête sur Shinobu qui restait là, devant Shiito, comme pour le protéger.
-Hors de mon chemin, gamine, dit-il d’un ton froid.
-Non, je ne vous laisserais pas frapper un homme saoul !
-Shinobu… laisse cet énergumène tranquille !
-Toi !
-N’avancez pas plus !
Shiito se rapprocha de la table à laquelle il siégeait avec les autres.
-Regardez le reculer… Aurais-tu peur, microbe ?
-Peur d’une… euh… vous ne ressemblez vraiment à rien cher monsieur !
-Quoi ?! Tu va morfler !
-Arrêtez !
Shinobu se prépara à contrer le coup, mais Shiito la poussa sur le côté et au même moment s’empara d’une baguette qui servit pour les brochettes de viandes, para le poing du colosse avec son bras gauche et fendit sur lui. Il le saisit au cou, et en un geste le retourna et le mit à terre. Il pointa la baguette juste au dessus de sa gorge qu’il serrait de plus en plus.
-Si tu la touche, le flot de sang qui circule en toi s’écoulera tel un torrent de larmes sur le sol où je te laisserais périr… » déclara Shiito d’une voix grave. 

Il se redressa, jeta la baguette sur l’homme qui restait paralysé par la peur puis, s’adressant à la serveuse qu’il avait bousculé :
« Désolé, je ne supporte pas tellement l’alcool. Je vous dédommagerais au moment de mon départ. » Il se retourna puis rejoignit ses compagnons. Lorsqu’il fut à la hauteur de Shinobu, il lui adressa un « Désolé » presque inaudible, puis monta à l’étage en s’appuyant aux murs pour ne pas tomber. Les Aspirant le regardaient quitter cette salle où la tension commençait à disparaître, la bouche bée et les yeux grands ouverts. C’était la première fois qu’ils voyaient Shiito dans un tel état.
Ren se remit de cette surprise, jeta un œil à l’homme qui était toujours à terre, se retourna puis commençant à suivre Shiito elle déclara d’un ton léger :
« Ce qu’il peut être poétique quand il est ivre !»
Elle monta les escaliers, puis Hiro, Shin, Yuki, Yuri, Mitsuko et Akira la suivirent sans rien ajouter. Shinobu n’avait pas bougé. Elle se tourna un instant vers l’autre monsieur, s’inclina légèrement puis repartit rejoindre les autres.

La fête semblait s’être terminée du côté du palais, plus aucune musique ne retentissait et plus aucun cri ne s’élevait de la cours. Kaito se reposait toujours sur le toit de l’auberge, admirant la lune et les étoiles qui scintillaient dans le ciel. Shiito apparut juste derrière lui, s’avança à ses côtés puis s‘assit de la même manière que son ami, en tailleur, sur l’arête du toit pentu de l’auberge. 
Après une poignée de minutes, Kaito décida de briser le silence qui le dérangeait de plus en plus. Son regard se leva vers la lune, éclatante ; il souffla un nuage de buée, l’air était frais.
-C’est bien demain que nous partons ?
-Oui.
-Ce sera étrange, rentrer chez nous sans cette jeune femme qu’on avait l’habitude d’apercevoir lorsque nous passions au palais.
-Ne parle pas d’elle, s'il te plait.
-Oui, pardon.
Le silence retomba entre eux deux. Shiito, la tête baissée, levant les yeux vers ce palais qu’il méprisait, songeait à ce qu’il pourrait bien faire une fois de retour dans leur pays, comment serait la vie sans cette femme qu’il aimait plus que quiconque depuis son plus jeune âge.
-Apparemment, il y a eu de l’agitation en bas ?
-…
-Il y a eu pas mal de boucan, il devait s’agir d’un différant. Si c’était le cas, vous êtes intervenu pour les calmer ?
-Non, c’est moi qui ai provoqué ça.
-Comment ?
-Bah, j’étais un peu saoul… Ces idiots de Shin et Hiro m’ont incité à boire pour être plus joyeux… et j’ai bu un peu trop de saké…
-… et, il s’est passé quoi, par la suite ?
-J’ai bousculé une serveuse qui a renversé son plateau sur un client, il s’est énervé…
-Et ?
-Et puis je me suis énervé aussi…
-…
-...

Il y eu un léger silence, vite interrompu par les éclats de rire de Kaito. Shiito lui lança un regard électrique qui l’arrêta net. Il toussa un peu puis reprit, essayant d’étouffer son rire.
-J’aurais bien aimé voir ça ! Shiito qui s’énerve contre quelqu’un… c’est du jamais vu.
-Ferme-la toi !
-En tout cas, t’as l’air bien moins atteint par l'alcool que tu ne devais l’être à cet instant.
-Mitsuko m’a flanqué une rouste… ça m’a calmé.
-Ah. En effet.
Shiito se leva lentement, après avoir regardé une dernière fois le palais et la lune qui brillait au dessus d’eux. « Allons rejoindre les autres. Nous devrons nous lever tôt demain matin. »

Les lumières de l’aube filtraient à travers les fenêtres d’une des chambres de l’auberge. Un des quatre occupants était déjà levé, assis sur son lit, en attendant le réveil des autres. 
Yuki décida de voir où en étaient les trois filles du groupe, il se leva, s’étira puis sortit de la chambre sans un bruit. Il alla toquer à une porte plus loin, au fond du couloir dans lequel l’air était frais. Le jeune homme frappa deux faibles coups à la porte à double coulissant et attendit une réponse d’une des trois filles. La porte s’ouvrit en grand, et Yuki sursauta en détournant la tête.
-Qu’est ce qu’il y a ? demanda Ren en le voyant.
-Si… si tu pouvais… nouer les lacets de ton corset et te couvrir, ce ne serait pas plus mal !
-Haaan? Yuki-kun qui rougit face à une jeune femme presque nue ?
-La ferme!
-Haai, c’est bon. Je reviens, ne bouge pas.
Ren referma la porte, laissant Yuki sans voix. Ses joues avaient pris une teinte rosée, et son cœur battait fortement. «Quelle idiote ! Se présenter dans une telle tenue… » Puis, il entendit Ren crier « Me voici !» depuis la chambre, le bruit de ses pas pressés résonnait dans tout le couloir, elle ouvrit à nouveau la porte. Ren était maintenant vêtue d’une robe légère en soie bleue qui mettait ses formes en valeur, elle avait rattachés ses cheveux rouges en un chignon maintenu par deux baguettes de fer blanc, quelques mèches lui tombaient sur le visage. Yuki admira cette figure qu’il voyait pour la première fois, à peine sortie de son lit, les lèvres luisantes et les yeux brillants. Ses joues reprirent leur teinte et les battements de son cœur repartirent de plus belle. La jeune femme remarquait que sa chemise blanche tremblait au rythme de ces battements et un sourire se dessina sur son visage.
Elle prit une voix tendre et demanda :
-Tu rougis ? Te ferais-je de l’effet ?
-Qu... Ne racontes pas n’importe quoi !
-Hihi !
-Bon... Est-ce que les autres sont debout?
-Bien sûr, et depuis longtemps. Elles prennent un bain, je pense qu’elles ne devraient plus tarder.
-D'accord. Je vais réveiller les autres dans ce cas.
Il commença à s’en aller mais Ren le retint par le bras. Elle prit une expression d’enfant en détresse, fit mine d’être embarrassée et dit d'une voix faible:
-Dis… Je… Tu ne voudrais pas rester un peu avec moi ? Il fait froid et je ne compte prendre un bain qu’une fois que les filles seront de retour, je me sens seule et je frissonne à cause de cet air matinal… ça te dérangerait de… venir me réchauffer?
Yuki rougit comme il n’avait rougit. Presque choqué par sa question il fit un sursaut d'un bon mètre de long, et il arrivait à peine à prononcer quelques mots qu’il saccadait.
-Qu… ! Euh ! Je ! Mais tu… ça va pas ? C’est quoi cette… cette… RAAH ! Espèce d'idiote!
Il se retourna vivement, toujours aussi embarrassé et Ren se mit à rire gaiement en voyant une telle réaction. Elle le regarda jusqu’à qu’il ne disparaisse derrière la porte de sa chambre, posa doucement une main sur sa poitrine et referma la porte devant elle. « Il est mignon quand il veut, celui-là. »

-Ex-excusez-moi…
-Oui?
Shiito se tenait droit devant la jeune dame de la nuit passée. Il affichait une expression qu’ont les timides s’apprêtant à déclarer leur flamme. La jeune femme le regardait en rougissant. Elle tenait un plateau entre les mains, serré contre sa poitrine
Ne sachant que dire, Shiito sortit simplement une bourse qu’il lui tendit avant de dire timidement : « Voilà, c’est pour hier soir. Encore désolé… » Elle regarda la bourse un instant, surprise, avant de la prendre dans une de ses petites mains aux doigt fins. Elle regarda alternativement cet argent et Shiito sans rien dire. Le guerrier, lui, s’apprêta à partir pour rejoindre ses compagnons qui l’attendaient devant l’auberge, et ce fut à ce moment que la serveuse s’avança d’un pas et déclara : 
-Merci infiniment, Akai-san!
-Hé?
-Oui! Akai-san, car … vous êtes tout le temps vêtu de rouge !
-Ha… oui, effectivement.
-Enfin... disons plutôt je ne connais pas votre vrai nom et que c’est… aussi une façon de vous remercier. Si vous n’aviez pas réagit de la sorte hier soir, cet homme immense m’aurait sûrement…

Shiito ne dit pas un mot. Il s’avança simplement vers la jeune femme et déposa dans une poche de son tablier deux sortes de parchemin.
-Le premier est un parchemin de feu. S’il revient et tente quoi que ce soit à votre égard, utilisez-le pour l'en dissuader. Et si jamais il continue de vous harceler, utilisez le second.
-Mais qu'est-ce que c'est ?
Il lui fit un simple clin d'oeil en guise de réponse puis il s’éloigna vers la sortie. Avant de passer le seuil de l’entrée pour de bon, il se retourna une dernière fois.
-Ah! Au fait, je m'appelle Shiito. Gardez le surnom que vous m'avez donné pour plus tard, peut-être que nous nous reverrons un jour.

Le reste de la troupe l’attendait à l’extérieur. Ils étaient déjà tous à cheval et près à partir. Il ne restait plus que le sien ainsi quecelui de la princesse qu’ils devaient ramener au pays. Il grimpa vite sur le dos de son animal, puis les dix soldats purent repartir. Le service de l’auberge leur adressait leurs adieux de la main. Yuri, Mitsuko, Ren, Shinobu, Hiro, Shin et Kaito s’étaient retournés et agitaient également leurs bras pour leur dire au revoir ; les trois premiers, Yuki, Akira et Shiito levèrent simplement le bras pour les saluer.

Le ciel était clair et beau, de hauts nuages surpassaient les montagnes que devait traverser les dix samouraïs et les feuilles des arbres qui commençaient à fleurir flottaient dans les airs au gré du vent. Les cavaliers venaient juste de passer le tori marquant l’entrée de la cité royale de Nuki Okushi Nai. Les mains de Shiito se serraient sur le cordage de son armature, et son cœur se crispait au fur et à mesure qu’ils s’éloignaient de la ville. 

La nuit venait tout juste de tomber lorsque les soldats arrivèrent au palais royal de Hagoyashi. Ils traversèrent le long pont au dessus du lac Okiyama pour se rendre au palais et faire leur rapport à leur maître ainsi qu’au roi. Akira s’étira largement, il était exténué par ce long voyage qu’ils venaient de terminer.
-Nous voilà enfin rentrés ! Ce pays de Nuki Okushi Nai est maintenant loin derrière nous.
-Tout à fait. Cependant… la princesse Yumi y est encore, ça m’attriste de penser qu’on ne la reverra que très rarement, répliqua Shinobu.

Shiito baissa la tête. Il pensait à son visage et son sourire, au teint clair de sa peau, sa chevelure noire, ses yeux envoûtants et sa si séduisante. Soudain, relevant la tête et prenant un autre visage, Shiito tira brusquement sur le cordage de son cheval et fit demi-tour. Il ne s’occupa pas de Yuki qui lui cria après et repartit au galop dans la direction opposée. Il chuchota quelques mots à l’animal puis se mit debout sur la scelle avant de hurler « Hiryuu !! ». Là, un gigantesque dragon semblable à un serpent aux écailles rouges aux reflets dorés, apparut soudain dans le ciel tel et se précipita vers Shiito. Il se rapprocha de lui de sorte à ce qu’il puisse monter sur son dos, frôlant le sol et volant à une vitesse fulgurante. Shiito sauta à son cou et grimpa sur son dos. Le cheval ralentit puis repartit rejoindre les autres comme Shiito lui avait demandé, et le dragon volant s’en alla dans les hauteurs du ciel.
Lorsqu’il eu atteint la ville de Nuki Okushi Nai il se dirigea sans attendre vers le palais. Sa vitesse était telle que, lorsque le dragon vola tout près de la muraille de l’enceinte du palais, il créa un vent puissant qui alerta la garde, souleva un nuage de poussière et emporta les feuilles des arbres et le feu des torches avec lui. La bête divine se posa le plus discrètement qu’elle le put derrière le palais, dans un immense jardin empli d’arbres, de fleurs et de fontaines plus belles les unes que les autres. Shiito descendit à terre, dit à son compagnon de rester ici à l’attendre et de se tenir près pour le départ lorsqu’il reviendrait. 
Les gardes couraient dans tous les sens depuis l’instant où un dragon volant eu été signalé aux alentours du palais. Shiito attendait une opportunité de se hisser sans être vu au balcon de la chambre de la princesse qu’il avait identifié à son arrivée. Il prononça une invocation qui lui permit de monter jusqu’à la chambre de la princesse en courant sur le mur. Il s’agrippa aux rebords du balcon puis sauta directement dans la chambre. La reine Yumi était là, assise devant un miroir sur un cadre doré et perdue dans le néant de ses pensées. Surprise, elle se leva de sa chaise et regarda Shiito, debout et légèrement essoufflé à quelques pas d’elle. Elle le regarda un instant avec des yeux grands ouverts, son cœur s’emballait, et aucun mot ne parvenait à sortir de sa bouche pourtant entre-ouverte. Shiito s’approcha d’elle, le poing ferme et les joues rougies, et prit délicatement ses mains dans les siennes.
-Shiito… que fais-tu ici ? Pourquoi es-tu revenu ?
-Je… je ne pouvais pas me résoudre à vivre sans vous, Yumi-sama.
-Shiito-kun…
-Je vous... Je t'aime Yumi.
Shiito prit les bras de Yumi et la rapprocha de son corps. Il déposa alors un doux baiser sur ses lèvres pulpeuses. Yumi ne réagit pas immédiatement. Sa déclaration ainsi que son geste l'avaient profondément troublée mais, malgré la surprise et les circonstances, elle l'aimait aussi en retour. Elle passa alors ses mains autour de son cou et se laissa embrasser. Elle prit goût à ce baiser qu'elle avait attendu pendant de longues années et qu'elle croyait ne jamais pouvoir recevoir.

-Yumi-sama !
Une quinzaine de gardes fit irruption dans la chambre de la reine. Shiito interrompit son baiser et les fixa d’un sombre regard. Les quinze soldats n’en revenaient pas. L’un d’eux, d’un grade des plus importants, s’écria « Arrêtez-les ! Arrêtez-les tous les deux !», puis ils fendirent tous sur les deux amants. Shiito poussa doucement Yumi derrière lui, sortit son katana de son fourreau puis mit les quelques soldats qui venaient sur lui à terre sans les tuer. Le plus haut gradé appela du renfort et Shiito profita de la confusion pour prendre Yumi par la main et courir vers le balcon. Il siffla aussi fort qu'il le put puis, prenant celle qu’il aimait dans ses bras, il prit appui sur le rebord du balcon et fit un saut si immense que la jeune femme crut que son cœur s'arrêta de battre. Hiryuu, le dragon, les récupéra aussitôt en vol. Et ils s’échappèrent, disparaissant dans l’obscurité de la nuit.

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