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Geneworld.net>Ficciones>Z-shadewolf>Une vie de mensonges.

15 - ATROPIA : SANCTUAIRE DE L'HUMANITÉ. POR Z-SHADEWOLF

Erine se réveilla doucement, une agréable sensation de chaleur lui parcourant tout le corps. Elle venait de faire un rêve étrange, effrayant, mystérieux et était bien heureuse de s’en être enfin sortie.
Elle s’étira et ouvrit un oeil, une exclamation de stupeur lui échappa : devant elle se dressait une colonne nacrée immense, plus grande encore que son manoir, faite de reliefs taillés sur lesquels ruisselait une eau claire et limpide. La jeune fille était subjuguée tant par la beauté mystique de l’édifice que par la crainte inexplicable qu’elle ressentait face à cette vision singulière et inconnue. Elle regarda autour d’elle, cherchant à savoir où elle se trouvait : à ses côtés se tenaient alignés trois fauteuils de cuir marron, identiques à celui sur lequel elle était assise, et deux tableaux de bord portant une myriade de boutons multicolores, dont un gros rouge au centre, encadraient de part et d’autre la rangée de sièges.
L’attaque, la trappe secrète, le couloir souterrain... Tout cela n’avait donc pas été qu’un rêve ?
Erine voulut se lever mais se rendit compte que le dôme de verre de l’appareil était fermé. Se souvenant vaguement de la façon dont elle et Lubio l’avaient ouvert précédemment, elle plaqua sa main sur la paroi translucide. Rien ne se produisit.

" Bizarre... " pensa-t-elle avec inquiétude, craignant quelque peu d’être enfermée, " Peut-être qu’un de ces boutons... "

Elle bascula sur la droite, une légère grimace de douleur aux lèvres – l’accoudoir du fauteuil lui rentrait dans les côtes – et appuya au hasard sur les interrupteurs colorés. Toujours aucune réaction de l’étrange engin. Elle commençait à sentir monter en elle une vague de panique à l’idée d’être prisonnière de l’appareil.

" Allons, " se dit-elle à haute voix pour se rassurer, " du calme. Je vais bien réussir à sortir d’ici. "

A peine eut-elle achevé sa phrase que le dôme bascula dans un sifflement mécanique, apportant aux oreilles de la jeune fille le doux son du ruissellement de l’eau auquel se mêlait une faible clameur, presque inaudible mais continue.
Erine sortit avec appréhension de la machine et chercha des yeux les propriétaires de ces voix entremêlées. Elle ne voyait personne devant elle, il n’y avait qu’un petit ruisseau cristallin, naissant des eaux pures de la colonne, qui serpentait devant elle et qui se perdait dans un horizon d’un blanc aveuglant. Elle se retourna et aperçut enfin ceux qu’elle entendait : là-bas, à une centaine de mètres d’elle, par delà un champ d’appareils semblables à celui qui l’avait conduites en ce lieu étrange, une importante foule s’amassait autour d’une estrade sur laquelle se tenaient dix ou douze individus dont cinq, très petits, restaient immobiles, alignés à l’écart du reste du groupe. Il y avait tant de personnes rassemblées que la jeune fille avait l’impression d’avoir devant elle tous les habitants de la Plaine d’Emeraude.
Elle contourna l’appareil et avança en direction de l’attroupement. Plus elle s’approchait, plus elle distinguait avec précision les êtres sur l’estrade. Lorsqu’elle fut à trente mètres de la foule, elle put avec une quasi certitude tous les identifier : hormis les cinq petites formes qui étaient en fait les chiennes de Lubio, il y avait face à la foule compacte le maitre des canidés, le Marquis, les maires des trois villages et deux inconnus tout habillés de vert qui se chargeaient, d’après ce que laissaient à penser leur stature et leur posture ferme, de la sécurité des intervenants. Lubio se tenait derrière un pupitre et s’adressait aux villageois.
Erine ne perçut pas très bien ses paroles. Ce qu’elle entendit bien, en revanche, ce fut les murmures de désapprobation avec lesquels la masse accueillit son intervention. Le garçon s’éloigna alors du micro dans une attitude mi-penaude, mi-agacée, et alla s’assoir d’un air boudeur près de ses chiennes, laissant sa place au Marquis. Autant qu’en put juger la jeune fille, le discours de son père fut approuvé par la foule alors qu’il était point pour point identique à celui de son ami : les mêmes syllabes, les mêmes intonations. Si la situation avait été autre, elle serait allée le consoler, lui faire part de son indignation face à la façon dont il était traité, mais l’heure et la situation n’étaient pas aux sentiments. Elle voulait entendre ce que disait son père. Elle se fraya donc un chemin parmi la foule, poussant les villageois qui, lorsqu’ils la reconnaissaient, s’écartaient avec une semi-révérence, et arriva assez près de l’estrade pour entendre chaque mot prononcé, même malgré les incessants murmures de l’auditoire.

" ...tis, l’accès à ce dôme sera condamné jusqu’à la levée de la quarantaine par les généraux. Ainsi, si par miracle des démons venaient à réussir à pénétrer dans un tunnel d’évacuation et si, par un prodige encore plus grand, ils arrivaient jusqu’ici avant de mourir de faim et de soif – ce qui est parfaitement impossible, même s’ils s’entre-dévoraient -, ces bêtes infâmes seraient prisonnières et condamnées à la noyade par la Source Eternelle qui inondera cette salle chaque nuit. "

Erine visualisa avec écoeurement l’image de loups noirs, comme ceux qui l’avaient pourchassée dans la nuit du troisième Bénomios de Dulias, essayant de surnager dans un océan de flots limpides, suffoquant dans le liquide pur, secoués de spasmes, puis flottant inanimés entre deux eaux. La même image lui procura un horrible haut-le-corps lorsqu’un des loups noirs fut remplacé par le loup blanc-argenté qui l’avait sauvée la même nuit. Bien qu’il s’agissait d’ennemis, de meurtriers sanguinaires et sans pitié, il était insoutenable pour la jeune fille d’imaginer une fin aussi atroce.
Erine regarda autour d’elle : plusieurs villageois, majoritairement des femmes, avaient le teint livide. Eux aussi avaient dû s’imaginer cette scène. D’autres semblaient indifférents à cette annonce, peut-être, songea-t-elle, parce qu’il s’agissait de loups, peut-être parce que, comme l’avait affirmé le Marquis, il était de toute façon impossible que des ennemis réussissent à arriver jusqu’à ce dernier rempart dressé entre l’humanité et son fléau.

" Bien. " Reprit l’orateur après une courte pause, " Habitants de la Plaine d’Emeraude, chers amis, il est temps à présent de quitter ce lieu. N’oubliez pas de vous référez aux enseignes et indicateurs pour trouver vos habitations de substitution dès votre sortie du dôme.
Une fois encore : bienvenue à Atropia ! "

Le Marquis Ratch s’éloigna du pupitre sous les applaudissements incertains d’une cinquantaine de personnes, puis un sifflement mécanique résonna dans l’immense salle. Derrière l’estrade, un rail de lumière horizontal apparut dans le mur incurvé d’un blanc nacré, devenant de plus en plus épais à mesure que ladite estrade disparaissait dans le sol comme happée par les profondeurs. Elle emporta avec elle les intervenants hormis Lubio qui, accompagné de ses chiennes, était parti bouder un peu plus loin peu avant la fin du discours du père d’Erine. Cette dernière, pendant que la foule se vidait peu à peu par l’ouverture qui avait à présent la taille d’une porte de hangar à avions, s’approcha de lui. Il semblait de très mauvaise humeur et repoussait en grommelant ses chiennes qui lui donnaient de petits coups de museau d’un air peiné. Si c’était leur intention, aucune ne parvenait à réconforter leur maître.
Lorsque la jeune fille ne fut plus qu’à une dizaine de mètres de son ami, celui-ci et ses chiennes tournèrent la tête vers elle d’un même mouvement. Les canidés se précipitèrent dans un joyeux désordre tandis que le garçon, après s’être relevé et épousseté, vint la rejoindre les mains dans les poches. Les oreilles basses, la queue fouettant l’air, les bêtes se mirent à tourner autour d’Erine. La demoiselle rit : les chiennes la chatouillaient frottant leurs têtes douces contre ses bras, soufflant sur ses mains, effleurant de leurs pattes ses pieds nus.

" Alors, la princesse des cents lunes s’est enfin réveillée ? " railla Lubio, arrivé près de son ami.

Il avait beau essayer d’être aimable, la jeune fille voyait bien qu’il était encore extrêmement vexé d’avoir été rejeté par les villageois alors qu’il venait de leur sauver la vie. Mais elle n’avait pas le temps de s’en soucier : elle-même se sentait au fond du gouffre. Peur, déception, incompréhension, désarroi, peine... tant de sentiments douloureux se bousculaient en elle, essayant de s’imposer en même temps, qu’elle avait l’impression que son coeur se fissurait un peu plus à chaque seconde et que son cerveau cognait contre ses tempes avec fureur.

" Em ! " fit Lubio en ôtant son bracelet d’argent.

Les chiennes s’immobilisèrent et le regardèrent, semblables à des soldats au garde-à-vous attendant les ordres. Le garçon s’agenouilla près d’un renfoncement dans le sol et y apposa le bijou : une trappe secrète se révéla un mètre sur sa gauche.

" Foyer ! "

Les canidés pénétrèrent en file indienne dans l’ouverture qui se referma sur leur passage, laissant les deux humains en tête-à-tête.
Erine et Lubio s’assirent à même le sol, n’osant se regarder. Ils étaient tout deux bouleversés et semblaient être pris d’une même nausée, trop faible pour réellement inquiéter leurs estomacs mais trop tenace pour s’estomper ou être ignorée. Après de longues minutes de silence, lorsque le trouble de la jeune fille se fut un peu calmé, elle demanda d’une voix incertaine :

" Où sommes-nous ? "

Son ami ne répondit pas. Il avait le regard vide, le visage dénué de toute expression, de tout sentiment : il avait l’air plongé dans se pensées les plus profondes, les plus secrètes.

" Lubio, " réitéra Erine, " où sommes-nous ? "

A l’entente de son nom, le garçon émergea de ses songes et, reprenant son habituel sourire de façade, se releva en aidant son amante à faire de même. Puis, d’un ton qui n’avait rien à envier à celui d’un guide touristique, semblant réciter un texte appris par coeur, il dit à sa compagne en l’entrainant vers la sortie :

" Bienvenue à Atropia, ultime refuge de l’humanité.
Bâtie par nos ancêtres il y a plus de deux cents ans grâce à la coopération mondiale des gouvernements, cette cité souterraine à deux étages s’étend sous toute la surface du Dinisus à plus de cinq kilomètres de profondeur. Plus de trois cents milliards de tonnes de béton et autres matériaux, un million d’ouvriers et soixante-dix ans de travaux furent nécessaires afin de faire surgir cette ville du néant, et quarante années de plus afin de l’aménager pour la rendre relativement confortable. Sa capacité d’accueil est suffisante pour abriter trois cents millions de réfugiés. Il en est de même pour les cinq autres cités souterraines éparpillées à travers le monde et dont les localisations les rendent inaccessibles à qui n’est pas censé s’y trouver. "

" Lubio... "

Ce dernier s’interrompit, regardant son amie qui avançait en fixant le sol.

" Arrête ça... Ca ne m’amuse pas... "

Le visage du garçon s’assombrit, son sourire s’effaça et son oeil reprit une teinte triste et amère.

" Nous sommes à l’abri. " fit-il pour répondre à la question de sa compagne, " Cet endroit est la plus sûre forteresse au monde. Mais... c’est aussi la pire des prisons... "

" Qu’est-ce que tu veux dire ? " l’interrogea-t-elle alors qu’ils avaient presque atteint l’ouverture.

Il soupira. Il avait l’air gêné, mal à l’aise.

" Ce que je veux dire, c’est que même si nous voulions rentrer chez nous, nous ne pourrions pas : nous sommes forcés de vivre dans cette cité jusqu’à ce que notre région ait été déclarée comme saine par les généraux. Cela pourrait prendre quelques jours, cela pourrait prendre des mois... "

Ils passèrent la porte et pénétrèrent dans une pièce aux murs tapissés de casiers métalliques. Jamais la jeune fille n’avait vu de pièce aussi longue : elle distinguait à peine le mur opposé à celui qu’elle venait de franchir. Lubio se retourna et parcourut toute la salle du dôme du regard : elle était vide de tout être vivant. S’approchant de la paroi à droite de l’ouverture, il y avisa un renfoncement semblable au précédent et y apposa également son bracelet. L’accès se referma sans bruit. Il prit alors son amie par la main et, après avoir scruté les murs, l’emmena vers la fin du premier tiers de la cloison de gauche. Durant leur bref voyage, Erine s’aperçut que chaque casier portait une étiquette, parfois bleue, d’autres fois rose.
Lorsqu’ils s’arrêtèrent, elle vit que le caisson du bas de la colonne devant elle portait une étiquette rose avec l’inscription « E.Ratch ». Indécise, elle regarda en coin le garçon qui lui fit un signe de tête pour l’encourager à ouvrir la porte. Elle s’accroupit alors et essaya d’abaisser la poignée, mais celle-ci restait coincée. La jeune fille insista et enfin le loquet céda. Devant elle se trouvaient maintenant deux étagères superposées. Sur celle du haut reposaient soigneusement pliés une chemise et un pantalon ample d’un gris perle identique. L’étagère inférieure, quant à elle, servait de support à une paire de chaussures noires.

" Ce sont des vêtements de rechange. " expliqua Lubio lorsque son ami leva la tête vers lui, l’air intrigué, " Dans la plupart des cas, seules les chaussures sont utiles car, comme nous, les gens chez eux n’ont pas le temps d’emporter les leurs en prenant la fuite. Mais, d’autres fois, il arrive que certains soient en train de se doucher lors de l’attaque... "

Erine enfila les souliers étonnamment à sa taille puis suivit le garçon vers la seconde ouverture qui se trouvait à l’autre bout de la pièce, symétriquement opposée à la première. Quelques instants plus tard, lorsqu’ils sortirent de la salle aux casiers, la jeune fille à la chevelure ébène resta muette de stupéfaction. Jamais elle n’avait vu, jamais elle n’aurait pu imaginer pareil décor : devant elle se dressait une demi-douzaine de rails aériens, semblant flotter à plus de trois mètres du sol, derrière lesquels se trouvait une place immense où s’amassait une foule dense, au parterre parsemé de mosaïques et au centre de laquelle, surgissant des carreaux colorés, se pavanait un arbre séculaire au feuillage dru et étincelant. Autour de son pied gigantesque se tenait une quinzaine de bancs de pierre grise disposés en un cercle parfait. Partout ailleurs, où qu’elle pose son regard, des immeubles d’une trentaine d’étages aux vitres teintes et aux parois d’un brun rocailleux se faisaient face.
Un bruit de piston derrière elle la fit sursauter. Lubio venait de refermer l’ouverture, toujours grâce à son bracelet. Son amante reporta alors son attention sur ce qui se passait devant elle. Les habitants de la Plaine d’Emeraude se regroupaient en trois rangs distincts derrière un tronçon de rail qui rejoignait le sol sur une dizaine de mètres. Près de ce dernier, une demi-douzaine de personnes s’affairaient à faire monter les villageois dans des voitures noires de quatre places semblables à celles de montagnes russes. Un peu plus à gauche, à l’écart de la zone d’embarquement, un homme à la longue chevelure de jais s’accroupissait chaque fois qu’un groupe de voitures quittait le sol, ce qui avait pour effet d’en faire venir d’autres. Chaque fois qu’il portait genou à terre, Erine avait l’impression qu’il plaquait quelque chose contre le sol.
Des pleurs attirèrent de nouveau son regard vers la masse près de la partie terrestre du rail : un petit garçon de quatre ou cinq ans hurlait, terrorisé, refusant de monter dans l’appareil sombre. Il se débattait, luttant désespérément contre sa mère qui le tirait par le poignet.
Ce petit garçon... La jeune fille avait le sentiment de le connaître.
Soudain, sans aucun signe annonciateur, la femme bondit en avant et décocha une claque magistrale à son fils. Erine retint un cri de douleur : la main de Lubio s’était crispée autour de ses doigts avec une force incroyable. Il fulminait, les dents serrées, l’oeil brillant d’une lueur de haine. Il semblait fou de rage.
Etourdi par la gifle, l’enfant n’offrit aucune résistance lorsque la mère, aidée par un des hommes en charge de l’embarquement, l’installa dans l’habitacle qui partit aussitôt. Une fois la femme hors de sa vue, Lubio retrouva son calme. Son amie, elle, le regardait du coin de l’oeil avec inquiétude. Le comportement de son compagnon et la perte du contrôle de ses émotions étaient de plus en plus troublants.
Une légère agitation attira une fois de plus son attention vers la foule : l’un des étrangers les avait vus et semblait faire passer le mot à ses six camarades. Tous les sept cessèrent leurs activités et saluèrent le garçon, certains levant une main dans un signe amical, d’autres mimant un semblant de garde-à-vous. Erine remarqua alors que chacun portait un objet brillant autour du poignet de la main qu’ils avaient levée.
Après avoir adressé un signe de tête aux sept hommes et femmes, Lubio bifurqua vers la droite, emmenant son amante avec lui, et s’éloigna de la place en suivant les rails aériens.

" Lubio... ? " fit Erine après plusieurs minutes de marche, " Est-ce que... Est-ce que tout va bien ? "

Jamais elle n’avait vu au garçon un air si grave et si tourmenté.

" Tu veux la vérité ? " lui dit-il plus durement qu’il ne l’aurait souhaité.

La jeune fille se tut et baissa les yeux vers le sol. Le ton de son ami la faisait se sentir coupable. Ce dernier soupira :

" Excuse-moi. Je suis un peu... énervé lorsque je viens ici. "

" Tu es déjà venu ici !? " demanda sa compagne avec surprise.

" Bien sûr. Toi aussi, même si tu ne t’en souviens plus. "

Devant l’air interdit de son amante, Lubio ajouta :

" Je t’expliquerai le pourquoi de cet oubli plus tard. "

" Mais... " continua Erine après un instant de silence, " je ne comprends pas ce qui t’énerve. Aussi bizarre soit-elle, cette ville à l’air plutôt... accueillante. "

Le garçon bascula la tête en arrière, son amie suivit son regard : quelques centaines de mètres au-dessus d’eux, un immense dôme de pierre portait en son centre une réplique lumineuse du Soleil. Celle-ci semblait se déplacer lentement le long d’un rail s’étalant sous tout le diamètre de la voûte.

" Je me sens comme prisonnier ici. " avoua Lubio, " Ne pas voir le ciel me donne l’impression d’étouffer, d’être oppressé...
Mais c’est normal, après tout : être enterré vivant est l’une des peurs ancestrales de l’Homme, de même que l’obscurité et que l’idée d’être dévoré vivant. "

En réponse au regard entendu de la jeune fille, il ajouta avant qu’elle ne le fasse :

" Oui, je l’ai aussi appris dans un livre. "

Ils continuèrent leur chemin sans dire mot. Le garçon ne masquait nullement son air morose, soit parce qu’il ne le voulait pas, soit parce qu’il n’y arrivait pas, mais il se forçait tout de même à sourire lorsqu’il remarquait les regards que lui lançait sa compagne.
Après plusieurs minutes de marche silencieuse, ils arrivèrent près d’un autre tronçon de rail qui rejoignait le sol sur une courte distance. Une dizaine de pas plus tard, ils s’immobilisèrent et Lubio porta genou à terre, fouillant du regard le béton autour de lui. Il trouva finalement ce qu’il cherchait, Erine le vit aussi : juste à côté de son ami, dans le sol qu’ils foulaient, il y avait une sorte de petit renfoncement rectangulaire presque invisible à l’oeil nu.
Le garçon ôta son bracelet et l’inséra dans le trou tel une clé. Une demi-douzaine de secondes s’écoulèrent puis, dans un léger vrombissement, un module noir semblable à ceux qui avaient emmenés les villageois s’arrêta près d’eux. Lubio aida son amante à s’y installer puis lui prit le poignet. La jeune fille ressentit alors un contact glacé. Lorsque son compagnon retira sa main, elle vit qu’un bracelet d’argent lui enserrait le bras.

" J’ai parlé à ton père. " lui dit le garçon, " Je lui ai parlé de... nous... Il se peut qu’il se montre encore plus froid et distant envers toi mais, quoi qu’il en soit, il n’a en rien contesté notre union. Tu peux porter ça en toute quiétude, désormais. "

Erine observa le bijou brillant. Pouvoir le porter au grand jour ne lui faisait pas autant plaisir qu’elle ne l’avait imaginé.

" Ce n’est pas qu’un bracelet, n’est-ce pas ? " demanda-t-elle, déçue.

" Non... " répondit Lubio en hochant la tête, " C’est un bracelet, mais c’est aussi une sorte de clé universelle dans cette ville. Cependant, seul les Gardiens sont autorisés à les porter, aussi tu ne devras jamais la prêter à personne. "

La jeune fille avait envie de pleurer. Elle se sentait si bête. Elle avait cru que c’était une preuve d’amour, une promesse de fidélité, alors que ce n’était qu’une stupide, stupide clé.
Le garçon s’aperçut de sa tristesse et posa ses mains sur ses épaules.

" Erine, je t’en prie... ne te mets pas dans cet état. Lorsque je le te l’ai donné, cela ne représentait qu’un bracelet, pas une clé. Je te le jure : mon coeur ne mentait pas. "

Il déposa un baiser sur ses lèvres, le plus doux baiser qu’Erine avait jamais reçu, et lui murmura à l’oreille :

" Je dois partir, maintenant. J’ai beaucoup de choses à faire. Il se peut que je ne puisse pas te voir régulièrement, mais j’essaierai de passer aussi souvent que possible. "

Lubio fit un pas vers l’avant de l’appareil.

" Je vais t’envoyer chez toi. " dit-il, " Il faut te reposer. "

" Lubio. " l’interpela alors Erine.

Son ami la regarda, l’air intrigué.

" Merci... de m’avoir sauvée. "

A ces paroles, le visage du garçon s’illumina d’un sourire heureux et ému. Pour la première fois depuis qu’il était arrivé ici, sa joie n’était pas feinte. Il se pencha ensuite vers le panneau de contrôle de la machine.

" Quartier des dirigeants. " annonça-t-il à voix intelligible.

L’habitacle s’ébranla et prit rapidement de la vitesse. Erine commençait déjà à s’élever dans les airs lorsqu’elle se retourna vers son amant. Celui-ci lui faisait de grands signes de la main. Soudain, il se figea puis, mettant les mains en porte-voix, il lui cria précipitamment :

" Béryl vert ! "

« Béryl vert » ? Que voulait-il dire par là ?
La jeune fille n’eut pas le temps de lui poser la question : le rail venait de bifurquer vers la gauche, l’entrainant au milieu de la masse d’immeubles, et le garçon avait disparu de son champ de vision. Ennuyée que le sort s’acharne ainsi contre elle, elle se laissa retomber sur son siège et attendit, regardant à peine défiler le paysage, ignorant la sensation grisante de vitesse et le vent qui lui caressait le visage. En d’autres circonstances, elle aurait pu trouver cela agréable, mais elle n’avait pas la tête à quoi que ce soit, pas même à apprécier cette délicieuse sensation ou à s’émerveiller de l’harmonie qui se dégageait des édifices devant lesquels elle filait à toute allure.
Un léger sourire se forma aux coins de ses fines lèvres. L’espace d’un court instant, son amant avait oublié ses craintes et s’était senti apprécier à sa juste valeur. L’espace d’un court instant, il avait ressenti la fierté d’un travail bien fait, la fierté d’une considération sincère et redevable. Et c’était grâce à elle qu’il avait pu connaître ce sentiment.

Après huit bonnes minutes de trajet, le module sombre commença à décélérer. Il rejoignit à nouveau le sol, passa sous un pont et s’arrêta. Erine se leva, les jambes engourdies, et descendit maladroitement du véhicule qui repartit aussitôt.

" Bienvenue au quartier des dirigeants, mademoiselle. " fit une jeune voix féminine dans son dos.

La jeune fille se retourna. Devant elle se tenait une femme ravissante à peine plus âgée qu’elle. Elle portait un large pantalon de toile blanc ainsi qu’un haut rose sans manches, le tout surmonté d’un béret vers foncé d’où s’échappaient quelques courtes mèches blondes. A sa ceinture pendaient un stylo rouge et une plaquette de bois sur laquelle étaient collées des feuilles s’apparentant de loin à des listes, et un bracelet d’argent scintillait à son poignet gauche.

" Puis-je connaître le nom de votre résidence d’affectation, je vous prie ? " continua la femme en prenant liste et stylo en main.

" Euh... " fit Erine, ne comprenant rien à la situation, " je ne le sais pas... Personne ne m’a rien dit... " puis elle hasarda, " « Béryl vert » ? "

" Vert... Vert... " répéta l’inconnue souriante en feuilletant sa liste, " Ah, voilà. Résidence Emeraude. Votre nom, s’il vous plait ? "

" Erine Ratch. "

Le sourire de la jeune femme se crispa.

" Ah... Mademoiselle Ratch... Ravie de vous rencontrer. " dit cette dernière en s’efforçant de retrouver un sourire chaleureux, " Mademoiselle... Erine Ratch... " ajouta-t-elle en cochant la case correspondant à ce nom sur la feuille de papier.

Elle reporta ensuite son attention sur la fille du Marquis.

" Etes-vous déjà venue ici ? "

" On m’a dit que oui. " répondit Erine, mal à l’aise, " Mais je n’arrive pas à m’en souvenir. "

" Dans ce cas, veuillez me suivre. " fit la femme blonde, " Je vais vous mener à votre résidence. "

Erine emboita le pas à l’inconnue qui s’engagea dans une rue bordée de part et d’autre de grands pavillons à deux étages. Tout en marchant, la femme lui expliqua certains détails pratiques, comme le fait qu’à chaque site d’embarquement de l’Aérorail – là où les rails rejoignaient le sol – se trouvait un Gardien sans lequel tout déplacement était impossible. Elle lui expliqua aussi que le couvre-feu prenait effet à vingt-deux heures trente et que, passé cet horaire, plus aucun Gardien n’assurait le service de transport. Chaque personne se trouvant dans un quartier autre que le sien y serait alors bloquée jusqu’au lendemain matin à neuf heures, heure à laquelle les Gardiens prenaient leurs postes aux sites d’embarquement.
Malgré l’attitude amicale de la femme, Erine sentait comme une tension entre elles et dans l’air les entourant : il y avait un certain malaise, une certaine amertume dans le ton de sa guide. Non seulement dans son ton, mais aussi dans ses gestes et dans les sourires fugaces qu’elle adressait à la jeune fille. Il était évident qu’elle ne se sentait pas sereine, qu’elle cachait quelque chose, mais quoi ?
L’inconnue s’arrêta soudain, Erine s’immobilisa près d’elle. Désignant un pavillon identique aux précédents d’un mouvement gracieux, la Gardienne lui dit :

" Vous voici arrivée à la résidence Emeraude, Mademoiselle Ratch. Si vous avez une question quelconque, n’hésitez pas à appeler les services de renseignement. Je vous souhaite une bonne fin de journée et un agréable séjour à Atropia. "

Sur ces paroles, la femme s’en alla, laissant Erine seule face au pavillon. La jeune fille commençait à se sentir anxieuse : Lubio avait dit que ce séjour forcé pouvait durer des semaines, des mois même, et elle se trouvait devant ce qui allait être son domicile pour cette période. Ne pas savoir ce qu’elle découvrirait en poussant la porte l’angoissait. Mais ce qui la terrifiait le plus, c’était que juste là, de l’autre côté de ce simple panneau blanc où était inscrit en lettres vertes < Résidence Emeraude >, se trouvait probablement son père.
Jamais Erine n’avait ressenti une telle appréhension. Qu’allait-il se passer lorsqu’ils seraient l’un face à l’autre ? Qu’allait-elle dire ? Et lui, qu’allait-il faire ?
Le coeur battant, la jeune fille avança jusqu’au perron, grimpa les marches en pas-d’âne et sonna. A sa grande surprise, la porte s’ouvrit sur le portier du manoir Ratch qui s’écarta pour laisser passer sa maîtresse. A peine cette dernière eut-elle passé l’ouverture qu’elle resta figée de stupéfaction. Tout était là, rien ne manquait : elle venait de pénétrer dans une réplique parfaite de son manoir.
Elle se dirigea vers sa chambre le plus rapidement et silencieusement possible, priant Centos de ne pas croiser son père. Malheureusement, sa prière ne fut pas exaucée : à peine s’engagea-t-elle dans le premier couloir qu’elle se cogna contre le Marquis. Les papiers qu’il lisait tout en marchant s’éparpillèrent au sol. Erine se précipita sur les textes et les rassembla, puis tendit le petit paquet de feuilles à son père. Ce dernier resta statique, posant un regard glacial sur le bracelet d’argent qui enserrait le poignet gauche de sa fille. Elle cacha alors rapidement sa main derrière son dos avec la même honte que si elle avait été surprise en train de commettre un acte répréhensible.
Jamais auparavant elle n’avait senti à quel point l’aura que dégageait son père était imposante. Elle avait l’impression d’être une faible fourmi au pied d’une montagne qu’elle devait gravir.
Erine guetta la réaction de son père, plus anxieuse que jamais. Ce dernier lui adressa un regard de dégoût et se contenta de souffler bruyamment. Sa fille eut le coeur brisé par cette expiration qui débordait de déception et de mépris. Puis le Marquis lui arracha les papiers des mains et s’en alla sans plus dire. La jeune fille, quant à elle, se rendit toute penaude à sa chambre. Mis à part la porte-fenêtre qui avait été remplacée par un trompe-l’oeil, tout était à sa place. Là, Erine se laissa tomber sur son lit et pleura jusqu’au sommeil.

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