Chapitre 08 : Contact avec la Chose
Indira ne prit même pas le temps de nettoyer les traces de suie, elle se coucha directement. Elle dormit d'un sommeil paisible jusqu'à ce que des bruits de pas la réveillent. Ces bruits étaient lents et réguliers. Ils devinrent de plus en plus rapides et la jeune fille découvrit qu'il s'agissait à présent des battements de son coeur. Elle avait peur, malgré ses bonnes résolutions.
Tout à coup, la porte s'ouvrit et une silhouette blanche entra.
-Indira, dit la voix de la silhouette. Tu m'appartiens. Tu es à moi corps et âme, et tu ne me refuseras rien...
La voix était aigre et rocailleuse et lorsque les yeux d'Indira se furent adaptés à l'obscurité, elle put distinguer une vieille femme maigre à la peau parcheminée, vêtue d'une longue robe -chemise de nuit ? blanche. Ses mains déformées par l'arthrite étaient devenues semblables aux serres d'un aigle qu'Indira avait vu dans un zoo. Ses yeux étaient vitreux, presque transparents et sa bouche était déformée en une sorte de rictus diabolique. Ses cheveux étaient blanc sale, comme de la neige ayant pris le gaz d'un pot
d'échappement, et descendaient jusqu'à sa poitrine flasque.
-Qui êtes-vous ? demanda Indira en tentant de cacher sa peur.
-Qui je suis ? Mais c'est très simple, je suis...
La vieille femme n'eut pas le temps de terminer car on la saisit par les cheveux et on la tira en arrière. Puis on ferma la porte et plus aucun bruit ne se fit entendre à part un "booom" résonnant, comme si une porte vers l'au-delà venait de se refermer.
Indira n'avait plus aucune envie de rester dans cette maison hantée. Elle se vêtit à la hâte d'un jean et d'un pull et descendit au salon, où elle remarqua que quelque chose avait changé.
Oui, mais quoi ?
Indira ne prit pas le temps de réfléchir plus longtemps au sujet. Elle s'empara des clés de sa voiture et partit après avoir verrouillé la villa.ndira roula longtemps en ville, puis elle décida de faire le tour du lac. Une pluie fine s'abattait sur le pare-brise et les essuie-glace s'empressaient de la chasser. Le vent faisait s'agiter les arbres qui bordaient le lac et entraînait l'eau, habituellement lisse, comparable à un miroir, en une multitude de vaguelettes.
En réalité, le temps qu'il faisait au dehors était comparable à l'état d'esprit d'Indira : sombre et agité. Des milliers de question se bousculaient dans la tête de la jeune fille : Qui était cette vieille femme ? Qui l'avait contrainte par la force à sortir de la chambre ? Ces gens étaient-ils des esprits ? Des fantômes qui hantaient la villa ? Lui voulaient-ils du bien ou du mal ?
Indira jeta un oeil dans son rétroviseur et vit le chiffon blanc qui avait été replacé sur la plage arrière. Et son reflet formait à nouveau un homme en blouse blanche.
-Qui êtes-vous ? demanda-t-elle d'un ton brusque. Que me voulez-vous ?
Cette fois, l'homme, le fantôme ou quoi qu'il soit, parla et Indira n'eut pas à lire sur ses lèvres. Mais étrangement, il ne prononçait que les voyelles, et Indira dût déchiffrer le message codé.
-EA, dit-il. ON ON E EA.
Indira réfléchit et finit par demander :
-Votre nom est...
La chose hocha positivement la tête et tenta d'articuler du mieux qu'il put : EA... Mais Indira se fia plus à ses lèvres qu'aux sons qui en sortaient et tenta :
-Stéphane ?
-Oui ! E EU EU OU EU A EU A.
Indira prit encore quelques secondes pour réfléchir et dit :
-Vous ne me voulez... pas de mal ?
Comme Stéphane ochait la tête, Indira lui demanda :
-Mais alors, que me voulez-vous ?
-A EN ION : EA AEN !
-Je dois faire attention à Eva Amen ? Et puis pourquoi parlez-vous ainsi, sans articuler ?
Stéphane ouvrit grand la bouche. Indira l'eut trouvé plutôt bel homme, mais l'intérieur de sa bouche n'avait ni dents ni langue.
-Mon Dieu... murmura Indira.
-EA AE !!!
-Eva ? Era ? Amen ?
La chose hocha négativement la tête et soupira. Indira sentit jusque sur son épaule le souffle glacé de cette "chose".
-OI IO.
-IO ? demanda Indira. Lino ? Nino ? Dino ?
A chacune de ses propositions, Stéphane hochait négativement la tête.
-Frigo ! s'écria Indira. C'est vous qui écrivez sur la porte de mon frigo ? Et je dois aller voir !
-Oui, répondit Stéphane avec un sourire édenté.
-Je vous remercie, Stéphane. Et c'est vous qui avez fait sortir la vieille femme de ma chambre ? Qui est-elle ?
-Oui, E OI. E E EA AEN.
-C'est vous. Merci. Et elle est... ce nom que je ne parviens pas à décoder. C'est à elle que je dois faire attention ?
-Oui.
-Que me veut-elle ?
-OU.
-Moi ?
Sur ce, Stéphane disparut.
-Attendez, Stéphane, revenez !
Indira rentra chez elle et comprit ce qui avait changé et qu'elle n'avait pas remarqué en partant de chez elle : les traces de suie avaient disparu.
Elle se dirigea à la cuisine et alluma la lumière. Comme Stéphane l'avait prédit, les aimants étaient déplacés et il formaient des lettres. Les numéros 19 et 78 étaient toujours placés au coin supérieur du réfrigérateur.
Que pouvaient signifier ces numéros ? Une année ?
Les autres aimants formaient une lettre et un mot de six lettres :
E LARSEN
Voilà ! La vieille femme s'appelait Eva Larsen !
Le lendemain, Indira irait à la bibliothèque et chercherait dans l'ordinateur des journaux datant de 1978 et parlant d'Eva Larsen.
La jeune fille allait retourner se coucher lorsqu'elle vit qu'il était déjà 7h00. Elle avala alors un café réchauffé à la hâte puis elle alla se doucher.
-Eva Larsen, je te tiens, murmura Indira alors qu'elle se maquillait dans la petite armoire à pharmacie.
Tout à coup, son reflet ne fut plus seul sur le miroir. La vieille femme aux cheveux blancs se tenait derrière elle et elle lui souriait. Ses yeux brillaient avec malice.
-Rira bien qui rira la dernière, dit-elle de sa voix trempée au vinaigre.
Indira se retourna mais elle ne vit personne, derrière elle, mise à part la douche et le cabinet de toilettes. Tremblante, elle tira le rideau de la douche mais elle était vide. La chasse d'eau glouglouta comme si quelqu'un venait de la tirer et un rire aigu résonna dans la villa.
-Taisez-vous ! cria Indira en posant ses mains à plat sur ses oreilles. Laissez-moi tranquille !
Lorsque le rire eut cessé, Indira termina de se maquiller rapidement sans oser se regarder dans le miroir. Tant pis si son maquillage était raté, plus question de voir "Eva Larsen" aujourd'hui ailleurs que sur des coupures de journaux.
La jeune fille se brossait les cheveux lorsque la sonnette se mit à tinter. Ce devait être Christine. Indira posa la brosse à cheveux sur le meuble et elle sortit de la salle de bains. Elle traversa le salon et alla ouvrir à son amie.
-Bonjour Indi !
-Salut Chris ! Je suis presque prête, je n'ai plus que mes chaussurers et ma veste à mettre, mon sac à prendre et ce sera bon.
Indira joignit le geste à la parole alors que sa collègue l'observait.
-Tu es bien pâle, aujourd'hui. On dirait que tu as vu un fantôme.
-Tu parles, j'en ai vus toute la nuit !
-Vraiment ? demanda Christine surprise.
-Non, répondit Indira en s'efforçant de sourire avec conviction. Juste façon de parler.
-Ah ! Je comprends ! Tu as fait un cauchemar !
-C'est ça, oui !
-Tu devrais boire un verre de lait chaud, le soir, dit Christine tandis qu'Indira verrouillait la porte de la villa.
-Ah bon, demanda Indira feignant l'intérêt.
-Oui, je faisais souvent des cauchemars, la nuit. Ensuite, tous les soirs, mère m'apportait un grand verre de lait chaud et j'allais mieux, je ne faisais plus aucun cauchemar.
Indira songea qu'elle devrait plutôt s'armer d'un crucifix mais elle ne fit aucun commentaire.
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Voilà, un chapitre de plus... J'espère que ça vous plaît toujours... Et si ça ne vous plaît pas, hé bien heu... abandonnez, je ne vous en voudrai pas ^^
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