Julian se réveilla. Il faisait agréablement chaud, et il n'osa ouvrir les yeux de peur que le rêve ne se rompe. Mais une bonne odeur de nourriture lui rappela qu'il n'avait pas mangé depuis longtemps, même s'il ne savait pas depuis combien de temps il avait quitté l'Hémisphère.
L'Hémisphère ! Il devait ouvrir les yeux, même si c'était prendre le risque que cette sensation de chaleur le quitte, car il devait sauver Mickaël. Il osa ouvrir les yeux et se trouva enroulé dans d'épaisses couvertures. Il regarda autour de lui et vit deux vieilles femmes aux yeux bridés qui remuaient le contenu d'une marmite. Elles étaient vêtues d'épaisses robes brunes et d'un foulard blanc sur leur tête.
-Bonjour, dit l'une d'entre elles avec un accent étrange. Je vois que vous êtes réveillé. Patientez encore un peu, la soupe sera bientôt prête.
-Est-ce vous qui m'avez trouvé ?
-Non, ce sont Blanka et Carla.
-Blanka est un ours, n'est-ce pas ?
Comme la femme hochait la tête, Julian se souvint que juste avant qu'il ne perde connaissance, une femme s'était adressée à l'ours qui le coursait dans un français parfait, sans accent. Qui était-elle ?
-Ils vont bientôt rentrer, car l'heure du repas approche et Blanka est grognon quand il a faim.
A ce moment-là, un épais rideau se desserra et une jeune femme fit son apparition, emmitouflée dans un long manteau dont la capuche était rabattue sur sa tête. La jeune femme était suivie de l'ours polaire et Julian tressaillit.
-Ne vous en faites pas, Blanka est très gentil, dit-elle en se débarrassant de son manteau. Excusez-le de vous avoir effrayé, il voulait seulement jouer.
Julian n'écouta cependant pas un mot de ce que disait la jeune femme. Il était fasciné par ses longs cheveux noirs, la peau blanche de son visage, et ses yeux pétillants.
-Nous passons à table, vous sentez-vous la force de vous lever ? demanda-t-elle ensuite.
-Oui, je crois.
Julian se dégagea des couvertures et il se dirigea vers la table, où il prit place.
-Je m'appelle Julian, déclara-t-il en souriant.
-Enchantée. Moi c'est Carole, même si mes deux amies ici-présentes m'appellent Carla. Et elles, ce sont Maddie et Annie.
Carole servit un bol de soupe aux pâtes et au poisson à Julian en expliquant :
-Le poisson est d'ici, mais les pâtes sont importées par les maris d'Annie et Maddie.
Lorsqu'elle vit que Julian mangeait goulûment, elle déclara en riant :
-Je comprends, vous devez être affamé.
-Oui, et de plus, je suis un peu pressé. Deux de mes amis sont sur un bateau, et fou que je suis, je me suis rendu sur la banquise afin de trouver un médecin.
-Un médecin ? demanda Carole.
-Oui, mes deux amis, Eolia et Mickaël sont sur un bateau, et Mickaël est tombé dans l'eau glacée. Comme je ne savais que faire, je suis venu ici pour trouver un médecin car Micka pourrait non seulement être paralysé, mais en plus souffrir d'une pneumonie.
-Je vois, dit Carole. Si vous voulez, je suis médecin. Je n'ai pas pratiqué depuis longtemps, mais à ce qu'on dit, ça ne s'oublie pas.
-Seulement, l'Hémisphère a sûrement beaucoup avancé depuis mon départ et je doute que...
-Vous avez dit le... l'Hémisphère ?
-Oui, pourquoi ?
-Et votre amie, Eolia, est la fille d'Eric ?
-C'est exact, mais... Mon Dieu, Carole ! C'est bien toi ? Tu es toujours en vie ? Je ne t'avais pas reconnue. Tu as beaucoup changé pendant ces dix années.
-Toi aussi, Julian. Dis-moi, y aurait-il de la place pour une personne en plus à bord de l'Hémisphère ?
-Cela m'étonnerait qu'Eolia refuse.
-C'est Eolia qui est à présent le capitaine de l'Hémisphère ? La petite fille aux nattes rousses ?
-Elle n'a plus rien d'une petite fille, à présent. Et lorsque je la regarde, j'ai l'impression de revoir Eric : aussi efficace, aussi responsable...
-Et Eric, où est-il ?
-Il est mort.
En silence, Carole mangea son bol de soupe, puis elle dit :
-Nous partirons dès que tu seras prêt.
Julian termina son bol.
-Je suis prêt !
Tous deux se vêtirent chaudement et après avoir fait leurs adieux à Maddie et à Annie, ils partirent.
-Où était l'Hémisphère la dernière fois que tu l'as vu ?
-A plusieurs kilomètres de la banquise. Mais j'ignore depuis combien de temps je suis parti.
Carole soupira de déception et dit :
-Regargnons tout de même le bord et marchons.
Joignant le geste et la parole, ils partirent d'un pas décidé. Tout à coup, ils entendirent un grognement.
-Blanka ! s'exclama Carole.
Ils continuèrent leur chemin à dos d'ours, ce qui était beaucoup plus rapide et beaucoup moins fatiguant.
A suivre... |