« Je vois que tu as trouvé l’Oeil du Dragon, poursuivit Terriar. Parfait, voilà qui va satisfaire mon frère.
- L’Oeil du Dragon ? C’est cette épée que tu nommes ainsi ? demanda Aliane, sa colère grandissant à mesure qu’elle parlait. Tu devrais la craindre puisque c’est elle qui a été et qui sera l’outil de ta destruction.
- Ah ah ! Petit moucheron, tu ne sais rien de cette arme, pas plus que tu n’en sais sur nous les Seigneurs de Guerre. L’Oeil du Dragon n’est pas un objet de mort. La preuve en est : je suis toujours en vie. Sache qu’il n’est pas une simple épée. Son rôle dans chaque monde est capital pour la survie des peuples mais entre nos mains, il vous sera fatal. »
Son rire horrible retenti encore une fois alors que des éclairs déchiraient le voile céleste. Puis, il reprit :
« Considère ce que je viens de te dire comme un cadeau d’adieu »
Terriar se rapprocha d’elle jusqu’à ce que leurs corps se frôlent et il enserra le visage d’Aliane dans une de ses grandes mains pour affronter, de son regard de néant, les yeux brûlants de sa proie.
« Quelque chose a changé dans tes yeux et je n’aime pas ce que je vois. Serait-ce un sentiment singulier tel que celui qui provoqua la perte de mon frère adoré ? »
Il leva les yeux et observa Corsan prêt à bondir.
« Celui-ci pue l’innocence mais il l’a aussi dans son regard. »
Le Seigneur de Guerre laissa apparaître un sourire mauvais et, brusquement, il plaqua sa bouche contre les lèvres d’Aliane. Corsan, bouillant de rage s’élança sur l’ignoble personnage mais, Metsis qui avait flairé le piège, le retint. Aliane s’écarta violemment de Terriar, dégoûtée, le souffle court et se réfugia dans les bras de Corsan qui n’attendait que ça. Dans ce mouvement, Aliane avait lâché l’étrange épée. Terriar, avec ce sourire cruel, s’approcha lentement de la lame sous le regard haineux de son ancienne esclave. Il se pencha avec un petit rire grinçant et effleura la garde dorée. La gemme rouge brilla furieusement et un violent éclair s’abattit sur le Seigneur de Guerre. Les trois humains, spectateurs abasourdis, contemplaient la masse fumante et inerte de Terriar.
Corsan senti la terre vibrer sous ses pieds et un cri de rage transperça l’air, pareil au tonnerre. La carcasse noire se redressa comme un ressort, deux yeux luisant de vide fusillant les témoins immobiles.
« Tu vas me payer cet affront Aliane, gronda Terriar, et toute cette haine que je ressens pour toi va enfin disparaître. Je vais te tuer et me tourner vers mon devoir l’esprit tranquille, sachant que tu auras souffert mille fois plus que tous les hommes de ce monde. »
La fumée qui s’échappait de lui venait, à présent plus de sa colère que se l’éclair. Aliane, paniquée, se précipita sur l’épée restée au sol et la brandit avec une détermination branlante. Terriar émit encore son insupportable ricanement tout en sachant qu’il ne pourrait atteindre la jeune femme si l’Oeil du Dragon restait entre eux. Il jeta un regard perçant vers Corsan et avec une vitesse que démentait sa corpulence, il s’empara brutalement du jeune homme, le mettant devant lui pour s’en servir de bouclier. Un couteau à la lame menaçante sorti du néant et vint se placer sur la gorge de l’otage. S’il ne pouvait atteindre Aliane physiquement, il se chargerait de la blesser psychologiquement jusqu’à la folie. Les iris vides de Terriar s’enflammèrent de plaisir tandis que la détresse d’Aliane la submergeait peu à peu. Terriar avait réussi à lui prendre ce qu’elle avait eu de plus cher et à présent, il voulait lui enlever Corsan, sa raison de vivre, la seule chose qui la retenait à ce temps et pour laquelle elle luterait jusqu’à la mort. Corsan lui criait de ne pas faire attention à lui mais ce n’était qu’une phrase comme en disent tous les hommes fiers. Puis, voyant son amant se débattre dans les pattes de ce monstre, la colère monta en elle. La rage à l’état pur comme une vague déferlante que rien ne pouvait arrêter. Un halo bleuté se matérialisa autour d’elle et la puissance afflua dans chaque fibre de son être. Le Seigneur de Guerre se ravissait en voyant cette métamorphose et, avec cet éternel et insupportable sourire, il se débarrassa de sa victime d’un geste désinvolte, plantant son terrifiant poignard entre les omoplates de Corsan. Aliane regarda son compagnon tomber sans comprendre et, en voyant le sang perler, elle prit conscience de toute l’horreur de ce qu’avait commit son ennemi. Une larme roula doucement sur sa joue, puis une autre et à la rage se mêla le désespoir. Des petits éclairs de puissance se mirent à parcourir son épiderme, ses yeux devinrent bleu, luminescents. Metsis, qui avait observé la scène, paralysé, avait à présent plus peur d’Aliane que du Seigneur de Guerre. Et, sans crier gare, toute la puissance se déchaîna pareil à une pluie de météores. Terriar, était tout de même un Seigneur de Guerre et il offrit une résistance qu’une autre n’aurait pas du tout ébranlé ne serait-ce qu’un petit peu. Mais il fut victime de ce qu’il avait déclenché. En ployant sous l’assaut, voyant venir sa fin, il se dit que, finalement, cette Aliane n’avait pas été si petite que ça et que ses frères auraient du mal à s’en défaire. Elle était increvable cette envie vivre et il se réjouit un court instant du mal qu’elle donnerait à Idraïm, son frère maléfique.
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