Jeudi 9 août
Comme Eolia l'avait prédit, l'Hémisphère arriva au vieux port cinq jours plus tard. Elle avait cuisiné comme elle l'avait pu le poisson mais n'en avait tiré aucune fièreté.
Une fois les cinq membres de l'équipage sortis, Eolia ferma le bateau et avec ses propres affaires et celles de Mickaël, elle se rendit directement chez la mère de ce dernier. Elle frappa. Une femme aux mêmes yeux verts que Mickaël vint ouvrir, une femme qu'Eolia considérait pratiquement comme sa mère.
-Bonjour Emma !
-Eolia, mon Dieu ! Comme tu as changé ! Mais que...
Emma n'eut pas le temps de terminer sa phrase, Eolia pleura dans ses bras, lui avouant la mort de son fils. Une fois apaisée par les mots tendres d'Emma, elle relata les circonstances de la mort de Mickaël.
-Je suis désolée, Emma, conclut-elle. J'aimais votre fils, je l'aimais tant même si je m'en suis aperçue trop tard.
-Lui aussi t'aimait, Eolia. A la folie. Maintes fois, il a tenté de t'oublier mais ses tentatives étaient toujours vaines. Le plus important à présent est qu'il ait su tes sentiments.
-Il... il les a sus. Je... je ne voulais pas qu'il vienne. Mais je n'ai pas pu l'en empêcher.
-Je sais, ma petite Eolia. Rien n'aurait pu changer sa décision de partir avec toi, elle était prise depuis trop longtemps.
Eolia serra les mains d'Emma dans les siennes.
-Reprends-toi, ma chérie. Crois-tu que mon fils aurait aimé te voir dans un tel état ?
-Je n'aspire plus qu'à une chose à présent que j'ai amené l'Hémisphère et son équipage à destination : aller rejoindre mon père et Micka.
Emma giffla violemment Eolia et s'écria :
-Tu es égoïste, Eolia ! Tu agis sans penser aux personnes qui tiennent à toi. Tu veux mourir ? Mais d'où vient cette lâcheté ? Sûrement pas de ton père !
-Mais je...
-Tu connais le chagrin que cause la perte d'un être cher et parce que tu es triste, tu comptes faire subir cette épreuve à tous ceux qui t'aiment ? Ton frère t'a manqué pendant dix ans et tu comptes l'abandonner maintenant que tu l'as retrouvé ? Et moi ? Mon fils est mort et tu comptes également me priver de la seule femme que j'aurais aimé avoir pour belle-fille ?
Eolia se leva, prit congé d'Emma et elle partit, les épaules voûtées, la tête basse.
Eolia resta longuement sur la plage, à regarder les vagues faire de longues allées et venues. C'était sur cette plage, autrefois, qu'elle faisait des concours de ricochets avec Mickaël. Bien sûr, elle gagnait toujours, mais elle savait à présent que c'était parce que son compagnon la laissait gagner.
-Micka... murmura-t-elle.
-Oui, je suis là, Lia.
La jeune fille se retourna et vit son frère.
-Matt ?
-Petite soeur, même après dix ans de sommeil, l'Hémisphère n'a pas perdu sa grande renommée. On l'a vu partir et revenir, et voilà qu'on confie déjà trois missions à son capitaine.
-C'est parfait, Matt. Je suis très heureuse pour toi.
-Comment cela ?
-Je ne pars plus à bord de l'Hémisphère. Je te le laisse, tu en es le capitaine à présent. De toute manière, c'est à toi que papa l'aurait laissé s'il ne t'avait pas cru mort.
-Nous partons dans une semaine pour laisser le temps à Ryoko et Julian de se marier. Si jamais tu changes d'avis, tu me trouveras chez Musha.
Eolia hocha la tête et elle regarda son frère partir. Elle resta très longtemps sur cette plage, et même si elle n'aurait su dire depuis combien de temps exactement elle y était, elle se souvenait avoir vu plusieurs fois le soleil se lever et se coucher. Elle avait dormi sur la plage, elle avait réfléchi, elle avait observé et à présent, il lui fallait rentrer chez elle.
Elle arriva devant la maison qu'elle avait occupée pendant tant d'années. Elle entra et arriva dans la petite cuisine. Elle n'alluma pas mais vit une silhouette assise sur une chaise.
-Qui est là ? demanda-t-elle.
-Calme-toi, Lia, ce n'est que moi.
-Mi... Micka ?
Ses yeux s'étant adaptés à l'obscurité, Eolia put en effet reconnaître son ami de toujours. Alors tout fut noir.
A suivre... |