La vie étudiante, ce serait quelque chose de nouveau pour moi. J'ai obtenu mon baccalauréat avec la mention "assez bien", ce qui fit la fierté de mon grand-père. Dans le même temps, j'ai décroché ma place en fac d'Histoire, ce qui le tracassa un peu plus. La raison de cette inquiétude était la distance qui séparait la fac de la maison, plus de 100 kilomètres, et également le fait je n'étais pas tout à fait humain. Il avait peur pour moi, il craignait que quelqu'un ne découvre mon secret.
Je l'avais rassuré le plus que je pouvais en lui promettant des centaines de fois que je serais très prudent. Malgré toutes les promesses, les deux mois de cet été-là furent encore et toujours consacrés à l'entraînement pour maîtriser la transformation, ainsi qu'à quelques techniques de self-défense. En ce qui concernait l'attaque, mon grand-père m'expliqua que mon instinct de loup m'aiderait si cela s'avérait nécessaire. En résumer, ces vacances furent plutôt sportives.
Malgré l'entraînement, la métamorphose gardait un côté plutôt terrifiant, ce n'était pas dû au fait qu'elle restait légèrement douloureuse, seulement je me suis rendu compte que sous mon apparence de loup-garou je possédais une force et une agilité hors norme. Plus généralement mes capacités physiques étaient devenues très supérieures à celles d'un humain. À dire vrai, ce qui m'effrayait encore plus, c'était l'impression de ne développer qu'une petite partie de mes nouvelles capacités.
La rentrée approchait à grand pas et je devais aller au campus afin de valider mon inscription, et surtout commencer à m'installer. Avec l'aide d'un voisin, car nous n'avions pas de voiture, nous sommes partis préparer mon logement d'étudiant. Arrivés sur place, nous avons découvert que le campus était un vaste territoire divisé en quartiers de plus ou moins grande taille. Certains étaient composés d'une dizaine de petites maisons et d'autres, d'un ou deux immeubles de 3 étages. Les équipements sur le campus ne manquaient pas : salle de sport, gymnase, librairie, bibliothèque, épicerie, et bien d'autres. Situé à peu près au milieu du campus, un très grand parc boisé.
Mon grand-père et moi sommes allés à la maison du gardien. Dans son bureau, il y avait un plan du campus accroché derrière lui, et sur le bureau, un épais dossier intitulé "Liste des maisons et appartements".
Lors de l'inscription, nous avions fait la demande d'une petite maison et par chance je l'ai obtenue en colocation. L'homme nous expliqua que les maisons étaient conçues pour cela. Après avoir clos le dossier, nous quittâmes le bureau et c'est à moment-là que je vis sur la liste des inscrits du quartier le prénom de mon colocataire. C'était une fille prénommée Sarah. Je fus surpris de ne pas voir de photo sur le dossier. J'allais donc devoir patienter jusqu'à la rentrée pour la rencontrer, en effet lorsque l'on est arrivé à la maison étudiante une dizaine de minutes plus tard, quelques cartons étaient déjà à l'intérieur, au rez-de-chaussée, ce qui signifiait qu'elle était déjà venue. En entrant dans la cuisine, un mot était déposé sur la table, il était écrit ceci :
" Cher ( Chère ) colocataire
Comme tu as sans doute pu le remarquer je suis déjà passé pour déposer mes affaires. Il n'y a pas besoin que tu t'en occupes, je le ferai moi-même à la rentrée. Je te demanderai peut-être un peu d'aide pour en mettre certains à l'étage. S'il y en a qui te gêne tu peux les déplacer il n'y a rien de fragile à l'intérieur.
Qui que tu sois, j'espère que l'on s'entendra bien.
Amicalement
Sarah "
En examinant de plus près, certains cartons portaient l'annotation "étage". Avec l'aide de notre voisin, Monsieur Ishmael TORERTRE, nous avons monté ces quelques cartons sur le palier de l'étage. Les miens furent posés dans le séjour. Je n'en avais ouvert aucun car préférant le faire à la rentrée, pour la simple raison que je souhaitais savoir quelle chambre elle choisirait. Le déchargement fini, nous sommes repartis à la maison, rapportant avec nous les clés du logement que le gardien nous avez données.
Encore une semaine avant la rentrée. Tout les préparatifs étaient terminés, il ne manquait que deux choses : un téléphone mobile et un ordinateur portable. Le premier était nécessaire pour contacter mon grand-père et le second pour le travail universitaire. Cela rassura mon grand-père de savoir que l'on pouvait garder le contact malgré la distance.
Le jour de la rentrée arriva, ce fut notre voisin qui m'emmena à l'université. La première journée fut consacrée à la distribution des emplois du temps par discipline, et à l'installation des étudiants sur le campus, ce qui, me concernant, était presque terminé. Mon grand-père me donna une certaine somme d'argent pour la semaine afin d'acheter les provisions nécessaires. Cependant grâce à une bourse d'étude que j'ai obtenu, il allait pouvoir garder ses économies. Nous avions convenu que je ne reviendrai à la maison qu'une semaine sur deux, ce qui éviterai à notre aimable voisin des déplacements trop fréquents.
De l'université, je pris l'un des bus qui la reliait au campus. Cette ligne desservait plusieurs arrêts sur le campus dont un qui était situé à moins de 500 mètres de mon logement universitaire.
Quand je suis arrivé, la porte était ouverte. En entrant, je découvris une jeune fille vêtue d'un chemisier blanc et d'une jupe noire. Elle cherchait quelque chose parmi les cartons. Je lui demandai ce qu'elle cherchait. Surprise elle répondit :
" Je cherche certains de mes cartons. Je ne les trouve pas et pourtant je suis persuadée de les avoir posé là le premier jour de mon emménagement la semaine dernière. Je viens d'arriver et cela m'intrigue.
- Si ce sont les cartons qui portaient l'annotation " étage ", je sais où ils sont... et excuse-moi de t'avoir surprise. Je suis Théo, ton colocataire. Tu dois être Sarah ?
- Oui... heureuse de te connaître. Comment sais-tu mon prénom ?
- J'ai vu le mot que tu avais laissé sur la table de la cuisine...
- Oh ! Tu disais que tu savais où se trouvent mes cartons...
- Exact ! Ils sont sur le palier à l'étage. Je les ai montés avec la personne qui m'a aidé à emménager.
- Merci beaucoup ! Vous m'avez rendu un grand service. Ils n'étaient pas trop lourds ?
- Non, on a eu aucun problème.
- C'est très gentil ! Merci encore !
Sur ces mots nous sommes allés à l'étage pour choisir nos chambres. Après une petite discussion, Sarah choisit la chambre à droite de l'escalier, j'ai donc pris celle de gauche. Nous avons ensuite placé nos cartons dans nos chambres respectives afin de ne pas encombrer le palier. Personnellement, j'avais commencé à en vider certains pour en ranger le contenu. Sarah fit de même. Le temps est passé plutôt vite car vers 21h, Sarah est venu frapper à ma porte. Elle me demanda si j'avais faim, je lui répondis que oui. Mais Sarah m'expliqua qu'elle n'avait pas apporté beaucoup de provisions car elle avait l'intention de faire quelques achats le jour de la rentrée. Nous avions mis en commun ce que nous possédions, nous disposions de suffisamment pour une semaine entière. Et puis mon grand-père avait, comme toujours, prévu large.
La suite des événements fut des plus classiques, les cours se commencèrent. Sarah entreprenait exactement les mêmes études que moi. Assister aux cours et vivre ensemble dans notre maison d'étudiant ne nous dérangeait pas car nos caractères étaient semblables. Sarah se révélait être une personne très gentille et agréable. Fréquemment de bonne humeur, elle la communique facilement au gens, et j'en étais le premier bénéficiaire. Parfois timide, elle n'osait pas intervenir dans certaines discussions. Pourtant c'était une personne exceptionnelle sur laquelle je pouvais compter.
Les jours passèrent se ressemblant, à la maison comme à l'université, et les habitudes se mirent en place. Sarah passaient tous ses mardis soirs à la bibliothèque du campus, pour approfondir ses cours, ou pour lire. La bibliothécaire fermait habituellement vers 20h30, Sarah travaillant fréquemment plus tard, elle s'était vu confier la clé. Elle verrouillait et glissait la clé dans la boîte aux lettres. À la maison, on s'était organisé pour les tâches ménagères. Comme nous mangions ensemble au restaurant universitaire le midi, seuls les repas du soir étaient à préparer, très souvent c'était moi qui m'en chargeais. Sarah faisait plus facilement le ménage, cela ne la dérangeait pas, prétendant qu'elle était une piètre cuisinière. Il est vrai que ses quelques essais à la cuisine, et malgré ses efforts, ne furent pas une franche réussite. Je l'encourageais pour qu'elle recommence une fois de temps en temps afin de s'améliorer. Quant à nos vêtements, chacun se débrouillait à faire ses lessives.
Pour ma part, certaines habitudes sont apparues : les sorties nocturnes à l'approche et durant la pleine lune, et un appétit accru dans ces mêmes périodes. Bref, tout ce qu'il fallait pour éveiller des soupçons. Sarah n'y prêtait guère attention, en tout cas c'était ce qu'elle laissait paraître.
Ces sorties me permettaient d'aller dans le parc pour poursuivre mon entraînement et me transformer. Pour sortir discrètement, rien de plus simple : je passais par la fenêtre de ma chambre, et filais vers les bois tout proche. Mais j'attendais toujours des heures tardives pour ces escapades, je ne voulais pas être découvert. Pour rentrer, je bondissais à la fenêtre restée ouverte, la porte en revanche était fermée à clé, Sarah ne devait pas s'apercevoir de mes absences.
Pour le reste, Sarah rentrait chez elle tout les weekend, tandis que je ne rentrais que tous les quinze jours. Au début, je mettais à profit ces week-end pour explorer d'avantage les lieux, le jour ou la nuit, pour me promener et faire de l'exercice.
Un mardi, vers la fin du mois d'octobre, en revenant de l'université, je croisais un homme qui cherchait quelqu'un parmi les étudiants. Il avait la photo de la jeune fille qu'il recherchait. L'université est vaste et nous ne nous connaissons pas tous, cependant la photo qu'il présentait me faisait penser étrangement à ma colocataire. Je ne portais pas plus attention à cet individu, et je suis rentré à la maison. Comme à son habitude, Sarah n'était pas repassée à l'appartement, elle était allée directement à la bibliothèque du campus.
Plus tard dans la soirée, je repensais à l'homme à la photo et subitement une foule de choses m'est venues à l'esprit. L'une d'entre elle me fit froid dans le dos : j'ai pensé que cet homme pouvait vouloir du mal à Sarah. J'ai alors pris la décision de me rendre à la bibliothèque afin de jouer les « anges gardiens » et m'assurer qu'il n'y avait aucun danger pour elle. La bibliothèque ne se situait qu'à deux kilomètres. Lorsque je suis arrivé, rien n'attira mon attention. D'un bond j'atterris sur le toit plat et surveillai les environs. De là, je me suis transformé augmentant mes capacités sensorielles afin de pouvoir éventuellement passer à l'action. Je suis resté là à attendre que Sarah sorte, pensant que si quelqu'un l'agressait cela se produirait à ce moment-là. Sarah rentrait à la maison vers 23h, il lui fallait 20 minutes de marche. Vers 22h30, j’entendais la porte de la bibliothèque s'ouvrir. Sarah est sortie et a refermé soigneusement derrière elle. J'ai commencé à la suivre en tout restant à bonne distance.
Après environ 10 minutes de marche, un homme apparut subitement et a pointé un pistolet vers elle. Je m’apprêtai à m'interposer quand il dit sur un ton calme mais déterminé :
" Prenez la direction du bois. Au moindre geste brusque je vous tue sur le champ. "
Cette voix me rappelait quelqu'un, c'était assurément une voix masculine, mais il m'était impossible de l'identifier, le capuchon porté par cette personne cachait son visage. Je les suivais jusqu'au milieu du parc le plus discrètement possible. D'un coup, j'entendis l'homme crier :
" Arrêtez-vous là mademoiselle Flow !
- Comment connaissez-vous mon nom ?
- Aucune importance, vous êtes soupçonnée d'être la descendante d'une sorcière... Je dois vous juger. "
À ce moment précis, je vis l'homme pointer à nouveau son pistolet sur Sarah et ajouta :
" Mais le jugement n'aura pas lieu car votre ancêtre a déjà été jugé, ce fut la peine de mort pour elle et pour toute sa descendance. "
En un mouvement, je m'interposai et me saisi de son arme. Surpris par cette action éclair l'agresseur recula.
" Je ne sais pas qui tu es, mais ce n'est pas ce soir que tu tueras quelqu'un ! " ai-je dit à l'homme et m'adressant à Sarah, sans lui montrer que je la connaissais :
" Courrez, sortez du parc, mademoiselle, faite moi confiance. " En silence et avec le regard un peu effrayé, Sarah se dirigea vers la sortie du bois.*
" Un loup-garou, ici, c'est une chance pour moi " déclara-t-il. Il enleva sa capuche : je reconnus instantanément l'homme à la photo.
" Que voulais-tu à cette jeune fille ?
- La tuer.
- Qui es-tu réellement ?
- Je suis un chasseur de créatures, on m'appelle Dark Hunter, j'étais ici pour m'occuper de cette jeune sorcière, mais je vais avoir le privilège de ramener également un loup-garou !
- Hors de question ! Tu n'auras rien ! "
Discrètement, il réussit à sortir un second pistolet et essaya de l'actionner mais j'eus le réflexe de m'écarter. D'un coup, je le désarmai et le mis à terre.
" Tu sembles bien jeune pour un loup-garou. Vas-tu être capable de me tuer s'il le faut ?
- Je ne suis pas un meurtrier !
- Tu n'en es peut-être pas un, mais tu en as l'instinct !
Dark Hunter s'est relevé et repris :
" Tu n'as pas le cran pour ça, c'est sûre, mais tu ne pourras pas la protéger indéfiniment ! "
Il sourit et je lui envoya un coup de poing en plein ventre puis je l'assommai. Je n'avais pas tapé trop fort, il était encore en vie. Je l'emmenai à l'extérieur du campus, le plus loin que je pouvais pour l'éloigner le plus possible de nous. Je repris le chemin de notre maison tout en m'assurant que Sarah ne rencontrait aucun problème.
Je suis rentré en sautant par la fenêtre de ma chambre et retourna à ma forme humaine. J'entendis Sarah entrait et montait rapidement l'escalier. La porte de sa chambre s'ouvrit et claqua immédiatement après. Malgré tout, j'étais inquiet pour elle, je sortais de ma chambre et me dirigeais vers la sienne. J'ai frappé à la porte et j'entendis :
" Entre Théo "
J'entrai et elle reprit :
" Excuse moi d'être rentré si violemment, j'ai dû te réveiller en claquant la porte de ma chambre, non ?
- Non je venais de me coucher, je n'avais pas encore fermer l’œil. "
Je remarquai qu'elle tremblait et qu'elle était sur le point de pleurer, mais vu ce qu'elle avait vécu c'était normal. Faisant comme si je ne savais pas ce qui s'était passé, je lui demandai ce qui lui était arrivé. Elle m'expliqua qu'un homme a surgi de nul part en pointant une arme vers elle, et qu'il lui ordonna d'aller dans le parc. L'homme avait l'intention de la tuée. Elle me dit que l'homme lui raconta que parmi ces ancêtres il y avait une sorcière, et elle fut jugée et condamnée à mort, elle, ainsi que tout ses descendants. Elle me raconta qu'au moment où l'homme allait tirer, une grande créature se plaça entre l'homme et elle, elle me dis que pour elle, c'était un loup-garou qui est intervenu et l'a sauvé. Je l'ai regardé au moment où elle a dit ça, car quand elle l'a dit, elle ne semblait pas surprise d'avoir vu un loup-garou.
Tout ce que je souhaitais désormais, c'est que le chasseur ne reviendrait pas, mais je souhaitais aussi que Sarah ne soit pas rendu compte que la créature qui l'a sauvé pouvait être moi. Je commençais à me perdre dans mes pensés, elle interrompu cet instant en disant :
" En y pensant, il a peut-être raison...
- Que veux-tu dire ?
- Je sais pas comment l'expliquer...
- Essaye avec ce que tu ressens.
- Il y a en moi quelque chose de puissant, dans mon âme qui va s'éveiller. Ce n'est peut qu'une impression mais je sens une certaine magie dans ce que je ressens. |