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Geneworld.net>Fan-fictions>Z-shadewolf>Une vie de mensonges.

12 - EFFACER LES SÉQUELLES BY Z-SHADEWOLF

" Il faut que je rentre, Père risque de se fâcher s'il s'aperçoit que je suis encore dehors à cette heure. "

La jeune fille et son ami avaient passé toute la soirée ensemble, blottis l'un contre l'autre. Dehors, la nuit était tombée depuis longtemps.

" Allons ! " répondit Lubio en la retenant par la taille, " Tu n'es pas dehors. Et puis, tu peux toujours dormir ici, avec moi. "

Erine parvint à s'extirper des bras qui la ceinturaient et se leva du canapé vermeil.

" Non, Lubio. Je dois rentrer - même si ta proposition me tente beaucoup. " ajouta-t-elle dans un clin d'oeil malicieux.

" Alors dans ce cas, je t'accompagne. Qui sait quel danger t'attend dehors ? "

Le garçon mima un monstre se jetant sur elle mais elle le repoussa en riant et il retomba sur le velours rouge.

" Tu me prends encore pour une petite fille ? Je sais me défendre ! "

La jeune fille se jeta à son tour sur lui, l'assaillant de chatouilles jusqu'à ce qu'il demande grâce.

" Alors ? " demanda-t-elle moqueuse, " A demain ? "

" A demain. " répondit-il le souffle court.

Elle déposa un baiser rapide sur les lèvres de son amant, prit son manteau et se dirigea vers la porte-fenêtre.

" Erine, attends ! " l'interpela alors le garçon.

Elle s'arrêta et se tourna vers lui. Il tenait la boite argentée contenant le bracelet d'Erine entre ses mains. Son amie lui sourit et lui dit :

" Il vaut mieux que tu la gardes pour le moment, tu ne crois pas ? Au moins jusqu'à ce que nous soyons officiellement ensemble. "

Son compagnon baissa les yeux, attristé, mais il savait lui aussi que c'était là la meilleure décision à prendre. La jeune fille sortit alors et, après avoir caressé les chiennes venues lui faire la fête, elle adressa un dernier « au revoir » de la main à Lubio et quitta l'enceinte de la propriété.

Erine avait déjà parcourut la moitié du chemin vers Centos lorsqu'elle croisa une Trinité dont les vétérans, derrière lesquels suivait le Cadet, la sifflèrent et la hélèrent.

" Hé, ma jolie ! Viens t'amuser avec nous ! "

Elle continua son chemin. Répondre à de telles paroles lui semblait sans intérêt. Les deux hommes s'élancèrent alors et, tandis que l'un lui bloquait le passage, l'autre lui coupa toute retraite. Puis, tels des vautours au-dessus d'un festin, ils se mirent à tourner autour de la jeune fille.

" Hé, toi ! Mon copain t'a parlé ! "

" Je sais. " répondit Erine.

" T'entends ça, Charles ? " continua le Benjamin, " « Elle sait. » "

" C'est méchant de m'ignorer, petite. " affirma l'Ainé, un homme costaud d'une trentaine d'années.

" Oui, très méchant même. " renchérit son compagnon, " On devrait la punir, tu n'penses pas ? "

" Bien sûr. C'est notre travail de punir les méchants. "

" Les... les gars. " dit timidement le Cadet, " On devrait y aller. Si le chef apprend que vous avez bu, il... "

" Silence, Cadet ! " tonna l'Ainé, " Je te défends de nous faire la leçon. "

" T'en fais pas, Charles. " railla le Benjamin, " Le petit ne dira rien : c'est qu'il ne voudrait pas être viré de l'armée, le bébé. Il ne trahira pas ses coéquipiers, hein le mioche ? " ajouta-t-il en se tournant vers le jeune.

Erine se tourna elle aussi vers le Cadet. Elle avait besoin d'aide, mais lui se contentait de baisser la tête. Elle sentit une grosse main s'étaler sur sa fesse droite et se retourna vivement, décochant une claque magistrale à celui qui s'était permis ce geste déplacé. L'ainé porta sa main gauche à son visage, tâta sa joue et envoya la jeune fille au sol d'un revers.

" Tiens-la ! " ordonna-t-il au Benjamin tandis qu'il entravait lui-même les jambes d'Erine.

L'autre homme lui attrapa les bras et les lui tordit dans le dos. Elle ne pouvait plus rien faire : ni bouger, ni se défendre.

" Aidez-moi ! " cria-t-elle au troisième soldat.

" Ne bouge pas, Cadet ! " lança alors l'Ainé, " Soit tu nous aides, soit tu pars ! Mais si tu t'avises de t'opposer à nous... "

" Dépêche-toi. " dit le Benjamin d'une voix excitée, " Ca fait deux mois que j'ai pas vu ma copine, j'en peux plus. "

Le Cadet regarda la jeune fille puis se retourna : il n'arrivait pas à soutenir son regard plein de détresse et d'effroi. Elle était seule, à la merci de ces monstres, mais elle refusa de céder à la panique et serra ses jambes l'une contre l'autre.

" Oooh... " dit le plus âgé en riant, " mais c'est qu'on se défend. Ce serait pourtant un honneur de porter l'enfant d'un soldat, petite. Tu devrais plutôt me remercier. "

Erine ne dit rien et se concentra afin de mettre le maximum de ses forces dans ses jambes. Si ces hommes en avaient après sa pureté, elle se battrait jusqu'au bout.
L'homme glissa ses mains vers l'intérieur des membres de la captive et commença à les tirer avec acharnement. Elle continua de serrer ses jambes aussi fort qu'elle le pouvait, mais le trentenaire avait bien plus de force qu'elle. Elle sentait ses gros doigts immondes s'immiscer de plus en plus entre ses genoux. Elle ne tiendrait plus longtemps, il lui fallait de l'aide, et tout de suite.

" A l'aide ! " pleura-t-elle de désespoir, espérant que le Cadet réagisse, " Au secours ! Lubio ! "

Derrière elle, le jeune tournait le dos à l'horrible scène en se bouchant les oreilles, tremblant de rage contre sa lâcheté. Soudain, le soldat réussit à écarter brusquement les cuisses de la jeune fille. Cette dernière sentit ses fémurs racler contre son bassin dans une douleur indescriptible.

Un grondement lugubre emplit le silence de la nuit. L'homme qui se tenait entre les jambes d'Erine eut à peine le temps de se retourner qu'une rangée de crocs blancs se refermèrent sur son cou et lui arrachèrent la moitié de la gorge. Il mourut avant même de se rendre compte de ce qui l'avait attaqué. Le soldat qui tenait les bras d'Erine la lâcha et dégaina l'Ogmis qui pendait sur son flanc droit. Il tira : le rayon de lumière frôla le pelage de la bête noire aux yeux jaunes. Celle-ci bondit sur le côté et grogna, faisant face à son nouvel adversaire. Le soldat prit le temps de viser : il ne devait pas manquer sa cible cette fois. Mais, avant même qu'il ait pu enclencher son deuxième tir, un second loup noir jaillit des ténèbres et lui arracha le bras dans un craquement sinistre. L'homme s'écroula dans un hurlement de douleur inhumain.
Tenant toujours le bras dans sa gueule, la créature fit face au Cadet. Ce dernier resta paralysé d'horreur : c'était lui, le monstre dont tous les soldats parlaient, le monstre que tous les soldats craignaient. La bête que les tirs d'Ogmis traversaient sans lui faire le moindre mal. La bête qui avait à elle seule massacré des centaines de Trinités. Le loup qui semait la désolation partout où il passait et qui, en un jour, allait d'un continent à l'autre sans que personne ne sache comment. Le loup sans iris, sans pupilles, aux yeux couleur rouge sang.
Les deux fauves avancèrent vers lui, il recula de quelques pas, trébucha et tomba en arrière. Le loup aux iris d'or s'arrêta. L'autre, lâchant enfin le bras du Benjamin, bifurqua vers la jeune fille à demi consciente tant elle avait été choquée par les derniers événements. Le soldat se redressa. Il était bien décider à la secourir : c'était pour ça qu'il avait choisi ce métier, pour protéger ses semblables des démons bestiaux. Le monstre n'était plus qu'à deux mètres de sa cible, il fallait qu'il agisse vite.
Il allongeait lentement sa main jusqu'à la gaine de son Ogmis lorsqu'une voix sauvage et gutturale résonna dans la nuit :

" Va-t-en si tu tiens à la vie. "

Le Cadet s'immobilisa de stupeur et regarda l'animal assis face à lui. Non, il avait dû se tromper, cette voix ne pouvait pas provenir de cette créature meurtrière. Mais... il était pourtant certain d'avoir vu ses babines bouger...
Il reporta son attention sur l'humaine et eut une nouvelle surprise qui faillit lui arracher un cri : les yeux du loup monstrueux perdaient peu à peu leur teinte rouge et, en leurs centres, deux iris jaune commençaient à apparaitre. Dans un même temps, sa fourrure ténébreuse se décolorait progressivement et virait maintenant sur le gris foncé.
Soudain, un flash illumina la nuit. Il y eut une odeur d'herbe brûlée. Le monstre redevint instantanément celui qui faisait trembler l'armée. En une fraction de seconde, il se retourna et bondit pour atterrir lourdement sur le Benjamin estropié qui se trouvait à cinq mètres derrière lui. Il lui déchiqueta l'avant-bras qui lui restait avec des grognements furieux et acheva le soldat en broyant sa tête dans sa gueule.

" Pars ! " gronda le loup aux iris jaunes à l'adresse du Cadet.

Celui-ci n'en pouvait plus. Tout cela avait été beaucoup trop loin pour lui. Il ne voulait pas mourir. Pas ici, pas maintenant, pas seul !
Le jeune homme prit ses jambes à son cou et s'enfuit vers Centos aussi vite qu'il le put.

*******************************************************************

Lubio tenait fermement Erine dans ses bras. Elle était évanouie. La louve noire, qui avait ramené la jeune fille en la tirant par la ceinture, lui avait tout raconté : comment, en cherchant de la nourriture, elle avait entendu des cris ; comment, tapie dans l'ombre, elle avait assisté à l'agression ; pourquoi elle était intervenue.
Une lame s'échappa de l'oeil du garçon. Pourquoi l'avait-il écoutée lui qui connaissait les dangers de ce monde ? Pourquoi ne l'avait-il pas suivie ? Rien de tout cela ne se serait produit s'il s'était montré plus attentif.

" Merci... " murmura-t-il à l'adresse de l'animal, " Merci du fond du coeur... "

La bête porta un regard triste sur Erine puis tourna de nouveau son museau vers Lubio.

" Je considère ma dette payée. "

" Oui, bien sûr. Je te suis même redevable. "

" Non. Tu ne me dois rien. Je ne veux plus te revoir, jamais. "

Le garçon prit soudain conscience du sang vicié qui salissait les babines de la louve. Soutenant toujours Erine d'une main, il sortit de sa poche un mouchoir bleu et l'approcha de la gueule du canidé. Mais à peine eut-il effleuré le museau de la jeune femelle que le regard de cette dernière, d'abord amer, devînt froid et plein de colère.

" Ne me touche pas, humain ! " gronda-t-elle.

Puis, avant même que le garçon n'ait eu le temps de faire un geste, l'animal fit demi-tour et courut avec grâce vers la forêt. Une fois arrivée à l'orée, la louve tourna son regard vers la maison isolée. Une larme chaude disparut dans sa fourrure et la bête s'enfonça au milieu des ténèbres protectrices.

Lubio poussa la porte d'entrée du pied, portant la jeune fille dans ses bras. Il l'emmena à l'étage jusqu'à son lit et l'y déposa avec douceur. Il redescendit ensuite au rez-de-chaussée prendre une chaise ainsi qu'une des vieilles robes de sa mère - qu'il avait conservées dans la buanderie en son souvenir - et les apporta dans la salle de bain, pièce annexe à sa chambre. Là, il déposa le tout à même le sol, laissa de l'eau tiède couler dans la baignoire et retourna chercher Erine. Tandis que la baignoire se remplissait, il déshabilla sa princesse avec prudence : il ne devait pas la réveiller, pas encore, pas avant d'avoir purifié son corps de la boue sanglante et de l'ignominie dont il était couvert.
Lorsque l'eau fut assez haute, il ferma les robinets et immergea le pauvre corps meurtri en maintenant la tête de son amie hors de l'eau. Il la rinça, la massa, la savonna et la shampooina du mieux qu'il le put. Il avait déjà lu dans un livre la façon dont il fallait laver un nourrisson, mais la pratique s'avérait difficile avec un corps adulte et qui plus est abandonné de toute conscience.
Il mit vingt minutes à la nettoyer entièrement puis la sécha et lui enfila la robe vert pomme de sa mère. Il la ramena ensuite sur le lit, la glissa sous les couvertures et attendit près d'elle, assis à même le sol, le reste de la nuit.


" Ca va... Ca va... Tout va bien... "

Depuis deux heures, il lui caressait le dos en lui répétant cette phrase. Depuis deux heures, elle s'était réveillée et s'était renfermée dan un mutisme absolu, les genoux serrés contre son tronc.
Il savait maintenant qu'elle se souvenait de tout, de ce qu’elle avait subi, et il savait aussi qu'elle garderait à jamais des séquelles de cette horrible nuit. Il se leva alors, l'air résolu, et prit Erine par le poignet. Elle retira vivement sa main en gémissant, le regard vide. Lubio passa alors son bras gauche sous ses genoux et l'attrapa par les épaules de son autre main, puis il la porta jusqu'à la bibliothèque où il l'allongea sur le canapé adjacent à la porte. Il ressortit ensuite vers le couloir et revint quelques minutes plus tard. La jeune fille n'avait pas bougé d'un pouce. Elle semblait n'avoir plus aucune volonté.
D'une main, le garçon lui souleva la tête et approcha de son visage un objet bleu-clair en demi-cercle, de la largeur d'une paire de lunettes, et le lui apposa sur les yeux et les oreilles. Puis, dirigeant un petit loquet présent sur la machine de la gauche vers la droite, il murmura :

" Je sais que je t'avais promis... Pardon de te mentir encore... "

Un grésillement inonda la grande pièce silencieuse.

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